Échanges : Hanoi devrait avoir son propre festival
À l'issue d'une formation en ingénierie culturelle à l'École des cadres du ministère de la Culture et de l'Information, soutenue par le FSP - Appui au développement culturel du Vietnam, Bernard Faivre d'Arcier , ancien directeur du prestigieux Festival d'Avignon, présente ses réflexions sur la direction artistique des manifestations culturelles et leur développement.
Il s'agit de votre premier voyage au Vietnam et donc de votre premier échange professionnel avec des confrères vietnamiens. Quelles sont vos impressions ?
La culture asiatique m'intéresse beaucoup. J'ai souvent été invité à des spectacles dans des pays asiatiques, surtout le Japon, la Chine, la Corée du Sud, l'Indonésie. On n'était pas encore venu au Vietnam par manque de temps, manque d'informations. Cette formation est une occasion pour échanger des expériences, pour aider un peu les cadres du ministère de la Culture qui n'ont pas toujours eu la chance de voyager hors du Vietnam et donc l'opportunité de mieux appréhender les différences et les situations inhabituelles. On a abordé les industries et les politiques culturelles. On a décidé aussi de parler de la production des événements culturels comme les festivals. Ainsi on a fait une étude de cas pour un festival à Hanoi.
... Et avez-vous été confronté à d'autres questions concrètes ?
On sent qu'il y a une réflexion en cours : comment faire pour garder le public vietnamien et attirer le public étranger et puis faire en sorte que le Vietnam participe un peu plus aux réseaux internationaux qui s'organisent, soit par les Asiatiques soit par les échanges Asie-Europe. On a même aidé nos interlocuteurs pour le jumelage entre Hanoi et la ville de Toulouse qui accueillera dans un mois une Semaine de la culture vietnamienne. On a abordé plusieurs questions pratiques et techniques.
D'après vous, quelles sont les influences de la mondialisation sur la culture d'aujourd'hui ?
On parle plutôt d'internationalisation ou de coopération internationale. C'est très important, ça ouvre les esprits et les pays. Des techniciens vietnamiens sont formés à Avignon. Mais il faut absolument, lorsqu'on est un artiste ou un organisateur, avoir cette expérience internationale. C'est important d'échanger, ça aide à la compréhension mutuelle des cultures. Il existe la mondialisation des biens, des services et des marchandises, mais il faut aussi qu'il y ait une circulation des œuvres, des esprits et des créations artistiques.
Le Festival d'Avignon peut-il inspirer une forme festivalière propre au Vietnam ?
Oui, parce que le Festival d'Avignon est né dans des conditions économiques difficiles, mais avec beaucoup d'enthousiasme, de bénévoles, et aussi des artistes. Je m'aperçois qu'en 60 ans, c'est un festival qui n'a pas vieilli mais qui s'est constamment rajeuni. Donc, il n'y a pas de corrélation entre le niveau de développement économique et la qualité culturelle. C'est bien d'en avoir au Vietnam s'il y a quelques artistes et la possibilité de faire naître quelque chose qui soit typiquement vietnamien, mais il faut qu'ils soient capables de coopérer avec d'autres festivals dans le monde.
Je pense que Hanoi devrait avoir son propre festival. La fête du millénaire de Hanoi est un excellent exemple. Le Festival de Huê est destiné à mettre en valeur l'architecture et l'histoire de cette ville. Et Hanoi devrait proposer un festival original, tous les 2 ou 3 ans. On peut imaginer un jumelage entre Hanoi et la ville de Charleville Mézières (Région Champagne-Ardenne) qui offre un festival mondial des théâtres de marionnettes. Ici, c'est aussi une spécificité vietnamienne, pas seulement limitée à celles sur l'eau. Il y a certainement quelque chose à concevoir et à imaginer.
Vous étiez consultant auprès de festivals internationaux. Que diriez-vous si l'on vous proposait de travailler avec le Festival de Huê ou dans le futur à Hanoi ?
Oui, j'adorerais ça. Je suis conseiller pour le programme d'un festival organisé par la Région Haute-Normandie (France) et aussi le président des Biennales de Lyon (danse et art contemporains), et je travaille pour des villes comme Paris ou Nice. J'aime beaucoup travailler en équipes et participer à leur formation.
Par Lê Thanh Tu - Le Courrier du Vietnam - 19 avril 2007
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