Semaine historique pour le Vietnam
Les autorités vietnamiennes ont réussi leur pari. L’un des derniers pays communistes de la planète est devenu le 150e membre de l’Organisation mondiale du commerce. En novembre 2006, le directoire de l’OMC, réuni en Conseil général à Genève, avait approuvé la participation d’Hanoï à l'organe de régulation des échanges mondiaux. Aujourd’hui, c’est chose faite : paré d’une réussite indiscutable et du fort potentiel que représente sa population de 80 millions de personnes, dont la majorité a moins de vingt ans, le Vietnam s’intègre formellement dans le commerce mondial et, par conséquent, au sein de la communauté internationale.
Classé jadis parmi les pays les plus pauvres du monde, le Vietnam s’est résolu en 1986 à une ouverture économique qui lui a permis de connaître une croissance importante et d’être classé parmi les dragons de l’Asie. Grâce à la politique du renouveau, labellisée Doi Moi, ce pays est passé en moins de quinze années d’une économie rurale dirigiste à une économie capitaliste en voie d’industrialisation. Dans les années 90, l’effondrement de l’Union soviétique, la relance des réformes en Chine et l’insuffisance de la reprise ont décidé les autorités à accélérer le processus de réformes. A partir de 2001, les taux de croissance de l’économie vietnamienne ont été remarquables, avec une moyenne de 7,25% par an.
La réussite du Vietnam ne serait pas si éclatante sans l’engagement personnel de Nong Duc Manh, l’actuel secrétaire du parti communiste et de la société civile. Duc Manh, un homme d’appareil souvent perçu comme un dirigeant sans charisme, a su imposer sa marque. Il a créé les conditions nécessaires pour le décollage de son pays. Dommage que ce digne successeur de Ho Chi Minh n’ait pas pensé à réformer aussi le système politique pour que le peuple vietnamien puisse jouir enfin des libertés fondamentales qui lui manquent cruellement. Mais la société vietnamienne change. Elle est même devenue le moteur dynamique de la croissance. En l’espace d’une génération, une classe moyenne urbaine a vu le jour, avide de consommation et porteuse de réformes dans tous les domaines.
Le seul fait que le Vietnam soit aujourd’hui un membre à part entière de l’OMC ne signifie pas que tous les problèmes soient réglés. Certains analystes soulignent combien un excès d’optimisme serait dangereux. La presse officielle se garde de tout triomphalisme soulignant que les changements ne seraient positifs «que si les entreprises locales parvenaient à s’adapter au nouveau statut du Vietnam dans le monde».
Par Any Bourrier - Radio France Internationale - 12 janvier 2007
OMC : le Vietnam est prêt à respecter ses engagements
Depuis le 11 janvier 2007, le Vietnam bénéficie officiellement des mêmes droits commerciaux que les 149 autres membres de l'OMC. Le pays est définitivement entré dans une nouvelle ère.
Outre les avantages apportés par l'entrée officielle à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le Vietnam doit respecter rigoureusement les pratiques internationales et ses engagements avec ses partenaires étrangers, estiment nombre d'experts et de chefs d'entreprises.
"La pression est grande mais notre service des télécommunications est fin prêt", a déclaré avec optimisme Dô Trung Ta, ministre des Postes et Télécommunications. Le pays compte 8 opérateurs de télécommunications dotés d'infrastructures modernes qui, maintenant, sont autorisés à coopérer sous forme de coentreprise avec des sociétés étrangères. La question la plus importante qui se pose maintenant pour ce secteur, c'est comment attirer des groupes étrangers puissants pour bénéficier de transferts de technologies et de capitaux géants.
"La plus grande mission du Vietnam, c'est l'amélioration de sa compétitivité", a estimé le vice-ministre du Commerce, Luong Van Tu, négociateur en chef du Vietnam pour l'entrée à l'OMC. Une sévère concurrence se fait sentir à 3 niveaux : produits, entreprises et gouvernement, a précisé le ministre du Commerce, Truong Dinh Tuyên. Son établissement a soumis au gouvernement un plan sur les politiques à élaborer pour un développement durable et rapide du pays après l'accession à l'OMC. L'accent est mis sur le perfectionnement du cadre juridique et des législations pour coller aux principes et règlements de l'OMC. Ces derniers temps, le pays a bien négocié sa phase d'intégration régionale (via notamment l'établissement du libre-échange entre les pays de l'ASEAN) et il n'a pas eu à souffrir d'un déferlement de produits aséaniens ultra compétitifs, a analysé Luong Van Tu. Pour les produits agricoles, certaines difficultés apparaîtront dans les entreprises de fruits et légumes, d'élevage ou de sucre. En revanche, certains produits vietnamiens auront l'occasion de se faire une place sur le marché mondial, a analysé le vice-ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Diêp Kinh Tân.
"Le renouvellement de l'état d'esprit des patrons d'entreprises est obligatoire", a dit Lê Dang Doanh, docteur, économiste de haut rang. La plus grande faiblesse des entreprises vietnamiennes porte sur l'absence de stratégie de commerce et sur des investissements modestes dans les sciences et la formation de main-d'oeuvre. Dans ce contexte, des faillites d'entreprises sont à prévoir, mais il faudra considérer cela comme une "destruction créative".
Comme il a rejoint l'OMC tardivement (il est le 150e membre), le Vietnam a dû certainement s'engager sur plus de points que ses prédécesseurs, a analysé Pham Chi Lan, économiste de haut rang, conseillère au sein du Comité d'études économiques auprès du Premier ministre. Ce sont les entreprises vietnamiennes qui joueront le rôle décisif pour le succès du Vietnam dans son intégration mondiale.
Paroles d'entrepreneurs
"Nous sommes bien préparés pour la réalisation des engagements dans le cadre de l'OMC", a déclaré Vu Duong Hiên, président du conseil d'administration, directeur général de la Compagnie papetière par actions de Hai Phong (Hapaco). Ses cadres qualifiés sont mobilisés pour traiter certains litiges au niveau mondial. Une étroite coordination s'est installée aussi entre les entreprises membres pour répondre à des commandes se chiffrant à des millions de dollars, a-t-il expliqué. Pour sa part, la Compagnie par actions des câbles et matériaux de télécommunications de Saigon (Sacom) souligne la nécessité de transparence. En tant que compagnie cotée en bouse, Sacom concentre ses efforts pour se doter d'experts administratifs répondant aux normes internationales, a fait savoir son directeur général, Dô Van Trac.
Par Thuy Tiên - Le Courrier du Vietnam - 12 janvier 2007
|