L’âme du Vietnam passe par Rome
Le rapprochement entre le régime de Hanoï et le Vatican est motivé par un double constat. D’une part, les autorités communistes jugent que l’action de l’Eglise catholique peut contribuer à rendre son âme à un pays devenu profondément matérialiste, où la corruption est endémique en raison de la recherche de l’enrichissement à tout prix. D’autre part, le gouvernement vietnamien est convaincu que l’Eglise peut apporter son aide dans l’assistance aux catégories les plus pauvres de la population.
Dans le passé, les relations entre les dirigeants communistes et le Vatican ont été particulièrement difficiles et complexes, en raison de la personnalité du pape Jean-Paul II. Celui-ci était considéré par le régime de Hanoï comme ayant contribué à la chute du communisme en Europe de l’Est. Les premiers indices d’un dégel sont apparus après l’élection de Benoît XVI. Aujourd’hui, la visite du Premier ministre Nguyen Tan Dung consacre une volonté commune d’avancer vers un possible établissement de relations diplomatiques.
Quoi qu’il en soit, la situation de la communauté catholique vietnamienne, la deuxième d’Asie du Sud-Est derrière les Philippines avec 6 millions de fidèles, s’est nettement améliorée. Parmi les changements positifs, les fidèles citent l’autorisation de recruter des candidats au sacerdoce tous les ans. En 2005, 57 prêtres ont pu ainsi être ordonnés lors d’une grande cérémonie à la cathédrale de Hanoï. Un autre signe d’ouverture : le régime communiste a accordé la permission aux catholiques d’organiser de grands rassemblements.
Cette libéralisation au compte-gouttes est perçue par la communauté catholique comme un immense progrès, dont l’Eglise bouddhique, majoritaire au Vietnam, n’a pas pu bénéficier jusqu’à présent. En effet, la hiérarchie de l’Eglise bouddhique unifiée du Vietnam ne cesse de dénoncer l’absence de liberté religieuse dans le pays. Les bouddhistes protestent contre le harcèlement à l’encontre des bonzes responsables des pagodes. Certains sont interdits de toute activité, d’autres sont envoyés en prison. Tous sont soumis en permanence à toutes sortes de tracasseries.
Après des années de relations tourmentées avec le pouvoir, les catholiques vietnamiens se montrent optimistes. La rencontre du pape avec le Premier ministre Dung est pour eux une victoire. Car ils savent qu’ils seront les premiers à profiter d’une amélioration des relations entre leur gouvernement et le Vatican.
Par Any Bourrier - Radio France Internationale - 19 janvier 2007
|