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Rendez-vous historique entre le Vietnam et le Vatican

ROME - La visite du premier ministre vietnamien au Vatican indique que la normalisation des relations entre les deux États est en cours, même s'il n'y a pas eu d'annonce d'un proche établissement de relations diplomatiques De l’armée populaire communiste en 1961 aux lambris du Vatican, en 2007… Le chemin parcouru entre ces deux dates par Nguyen Tan Dung, l’actuel premier ministre vietnamien qui a rencontré jeudi 25 janvier Benoît XVI, en dit long sur l’évolution de ce pays. Et permet de comprendre pourquoi, de part et d’autre, on qualifiait cette visite d’historique.

« C’est la première fois qu’un premier ministre de la République socialiste du Vietnam a rencontré le Saint-Père et les plus hautes autorités de la Secrétairerie d’État », affirme le communiqué diffusé jeudi par le Saint-Siège. Souriant et détendu, Nguyen Tan Dung semblait en effet ravi de se retrouver là, même si la demi-heure d’entretien qu’il a eue à huis clos avec le pape s’est déroulée en présence des traducteurs et du chef de la commission vietnamienne pour les affaires religieuses. Ensuite, le responsable du gouvernement s’est d’ailleurs refusé à toute déclaration à la presse. Selon le Saint-Siège, cette visite marque un « nouveau et important pas vers la normalisation des rapports bilatéraux » qui ont, poursuit le texte, enregistré des « progrès importants, ouvrant un espace plus large de liberté religieuse pour l’Église catholique ». Pour autant, et pour l’avenir, le communiqué reste prudent, espérant que les prochains problèmes entre les deux États seront résolus « à travers les canaux de dialogue existants ». Ce qui signifie que, pour l’instant, il n’y a pas de perspective concrète d’établissement de relations diplomatiques officielles entre le Vietnam et le Saint-Siège, même si, confie-t-on à la Secrétairerie d’État, il ne semble plus y avoir d’obstacle du gouvernement communiste de ce point de vue.

Après les Philippines, la plus grosse densité de catholiques

En attendant, la visite de jeudi marque sans aucun doute une étape importante. Que l’image du premier ministre vietnamien assis au côté du pape ait été retransmise largement par les médias officiels de ce pays, est significatif. La rencontre signait la reconnaissance, au plus haut niveau, de la normalisation de fait des relations entre les deux États. Ainsi existe-t-il une forme d’accord pour la nomination des évêques : le Vatican présente au gouvernement de Hanoi le nom du candidat, avant de le nommer officiellement, ce qui est, après tout, la même procédure qu’en France. « Le problème, c’est que, encore aujourd’hui, les autorités vietnamiennes interprètent trop souvent cela comme la possibilité pour elles de refuser la personne », confie-t-on à Rome.

L’enjeu est important pour le Saint-Siège : dans ce pays de 83 millions d’habitants, jeune (60 % de la population a moins de 30 ans) les catholiques représentent un poids non négligeable, entre 6 et 7 millions de personnes. « Après les Philippines, c’est la plus grosse densité. » L’Église y est très dynamique, comme cela est ressorti en décembre dernier du premier congrès missionnaire asiatique, tenu en Thaïlande. Elle est notamment fortement impliquée dans le domaine social, la lutte contre la pauvreté, ou le soin des malades atteints du sida. Son statut n’a cessé de s’améliorer ces dernières années, après la période de persécution qui a suivi la réunification du pays : c’est en 2002 qu’a eu lieu la première visite officielle du vice-premier ministre du pays au Vatican, qui a rencontré le secrétaire d’État de l’époque, le cardinal Angelo Sodano.

La liberté religieuse reste limitée au Vietnam

En 2005, l’État vietnamien a envoyé un message de condoléances pour les funérailles de Jean-Paul II. En juin et juillet de la même année, des représentants du gouvernement ont eu une réunion avec leurs homologues du Vatican, à Rome. Inversement, il y a eu quatorze visites de délégation du Saint-Siège au Vietnam. La dernière en date, en décembre 2005, celle du cardinal Crescempio Sepe, alors préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, qui s’est rendu dans le pays pour ordonner 57 prêtres. Le gouvernement vietnamien voit dans l’Église catholique un précieux soutien dans sa lutte contre la corruption et la pauvreté. De plus, son adhésion à l’OMC (Organisation mondiale du commerce) obtenu cette année, était liée, de par les États-Unis, à des améliorations sur le plan des libertés religieuses.

À quand, dès lors, l’établissement de relations diplomatiques ? Tout le problème en réalité, observe-t-on côté Vatican, est de savoir si le Vietnam ira plus vite que le « grand frère chinois ». Ce sera d’ailleurs un bon indicateur de l’influence qu’exerce ou non la Chine sur ce voisin. Entre les deux pays cependant, sur le plan religieux, les situations sont très différentes. D’une part, la population catholique, en proportion, est plus importante au Vietnam. D’autre part, la tentative de créer une Église patriotique comme en Chine n’a pas abouti au Vietnam, où les églises n’ont jamais été complètement fermées. Pour autant, la liberté religieuse reste limitée au Vietnam et, dit-on au Vatican, « le gouvernement a encore cette conception d’un contrôle nécessaire sur l’Église et ses activités ». Cela n’empêche pas le Saint-Siège de tout faire pour établir des relations officielles : « Ce sera une grande aide de pouvoir compter sur un représentant comme le nonce sur place. Et malgré les manques, le degré de liberté religieuse autorise, de notre point de vue, la reconnaissance diplomatique. Elle permettra d’aller de l’avant. »

Par Isabelle De Gaulmyn, - La Croix - 25 janvier 2007


Entrevue entre le Premier ministre vietnamien et le pape du Vatican

ROME - Le Premier ministre vietnamien, Nguyen Tan Dung, a eu le 25 janvier au Vatican, une entrevue avec le pape Benoit XVI et s'est entretenu avec son homologue du Vatican, le cardinal Tarcisio Bertone. Il s'agit de la 1ère rencontre entre le chef du gouvernement vietnamien et le pape ainsi que le Premier ministre du Vatican. Cette rencontre témoigne de la bonne volonté et du souhait du Vietnam et du Vatican de renforcer le dialogue et la compréhension réciproque.

Lors de cette rencontre, Nguyen Tan Dung a communiqué les grands résultats de signification très importante acquis dans plusieurs domaines par le Vietnam en 20 années de Renouveau, d'ouverture et d'intégration internationale. Il a affirmé que le Parti communiste du Vietnam (PCV) et l'Etat vietnamien tenaient toujours en considération le droit à la démocratie, le droit de liberté de croyance et de religion des citoyens, qui sont stipulés dans le Droit vietnamien et constamment respectés. Cela favorise l'amélioration de la vie spirituelle et est considéré comme un facteur important assurant la solidarité nationale. Au Vietnam, la communauté des Catholiques est une des celles dynamiques ayant l'amour de Dieu et l'amour de la Patrie, apportant leurs contributions actives à l'édification et au développement du pays.

Le gouvernement vietnamien attache beaucoup d'importance aux relations avec le Vatican. Les deux parties ont eu des rencontres annuelles afin d'avoir des échanges sur les problèmes relatifs à l'Eglise catholique du Vietnam et à d'autres problèmes d'intérêts communs. Ces rencontres ont apporté des résultats actifs et aidé les deux parties à mieux se comprendre. Le gouvernement vietnamien préconise de poursuivre le processus de dialogue direct avec le Vatican, sur la base des principes de respect mutuel et de non-ingérence dans les affaires intérieures d'autrui. Le Vietnam souhaite que le Vatican encourage la communauté catholique du Vietnam étroitement liée au pays et au peuple, servant de base pour le développement des relations entre le Vietnam et le Vatican.

Pour leur part, le pape et le Premier ministre du Vatican ont hautement apprécié la politique et la situation réelle des libertés religieuses et de croyances du Vietnam, les considérant comme un modèle du genre. Le Premier ministre du Vatican a proposé d'établir des relations complètes entre le Vatican et le Vietnam. Le Premier ministre Nguyen Tan Dung a reçu les avis de son homologue du Vatican quant à l'établissement de relations diplomatiques et a proposé de confier aux bureaux diplomatiques des deux pays la tâche de discuter concrètement sur ce point. Nguyen Tan Dung a remercié le pape et le Premier ministre du Vatican pour leur accueil respecteux. Il a exprimé la conviction qu'avec bonne volonté et détermination de chaque partie, les relations entre le Vietnam et le Vatican continueront de se développer, conformément aux souhaits des deux parties.

Agence Vietnamienne d'Information - 25 janvier 2007


Vent d'espoir pour les catholiques vietnamiens après la rencontre papale

HO CHI MINH-VILLE - Il y a encore quinze ans, les catholiques du Vietnam apprenaient à se cacher. Avec la rencontre à Rome entre le Premier ministre vietnamien et le pape jeudi, c'est un vent d'espoir qui a soufflé sur leur liberté de culte. Jeudi, Benoît XVI et Nguyen Tan Dung ont entériné par une rencontre historique au Vatican le rapprochement enregistré ces dernières années entre les autorités communistes et le Saint-Siège.

Si l'établissement des relations diplomatiques doit encore franchir de nombreux obstacles, il ne semble plus être qu'une question de temps. Et dans un pays habitué à des réformes lentes et à des avancées prudentes, les catholiques ne dissimulaient pas leur satisfaction. "Nous avons prié pour que la rencontre soit réussie et que nous puissions bénéficier réellement de liberté religieuse", a indiqué le Père Fero Nguyen Quang Toan, vicaire d'une église de quartier à Ho Chi Minh-Ville (sud). "Cette rencontre est une étape fondamentale".

Depuis cinquante ans, la situation des catholiques vietnamiens a épousé les violents soubresauts politiques du pays. En 1954, après le départ du colonisateur français et l'arrivée au pouvoir des communistes au Nord, la majorité des fidèles ont fui vers le sud, alors sous influence américaine. En 1975, le Vietnam réunifié a placé l'église sous l'étouffoir dans tout le pays, craignant que l'allégeance des catholiques au pape ne soit une menace pour la suprématie du Parti communiste (PCV). Cette perception demeure aujourd'hui dans le regard de nombreux responsables. Mais avec l'ouverture du pays sur l'étranger et la nécessité pour Hanoï de redorer son image sur l'échiquier international, la pression s'est relâchée sur le culte.

Désormais, dans l'ex-Saïgon, la cathédrale et les églises de quartier font le plein tous les dimanches et les catholiques s'affichent avec plus de détermination, parfois en conservant avec fidélité le portrait de Ho Chi Minh, fondateur du PCV et père du Vietnam moderne, aux côtés de celui du pape. "L'aspiration commune des catholiques est d'être libres de pratiquer leur religion", résume Do Thi Lan, une vendeuse de pain de 46 ans. Peu à peu, l'espace se libère.

Fin 2005, 57 prêtres avaient été ordonnés dans une fastueuse cérémonie en la cathédrale de Hanoï. Le recrutement des diacres, le mouvement des prêtres dans leur diocèse et les activités des fidèles sont désormais moins entravés. Les mois et années à venir devront permettre de surmonter les ultimes réticences. L'église du Vietnam tentera de récupérer des terrains, de publier son journal, de créer son système d'éducation, et de faire reconnaître les communautés catholiques encore fortement victimes d'ostracisme dans certaines provinces du nord du pays. Les fidèles, eux, devront compter sur une lente évolution des mentalités. Après la guerre, "nous n'allions pas souvent à la messe. On priait et on lisait la Bible à la maison, quasiment secrètement", se souvient ce catholique de 60 ans du centre de Hanoï, qui préfère encore cacher son nom. "Aujourd'hui, la vie est plus simple", admet-il.

Mais "il n'y a pas de liberté religieuse au Vietnam. Certains établissements publics n'aiment pas avoir des employés catholiques. Ils ne s'y opposent pas publiquement parce que c'est sensible, mais on le ressent tous et tout le monde le sait". Jeudi, le Vatican s'est félicité des "progrès concrets enregistrés ces dernières années". La rencontre "réhaussera le prestige, l'esprit et la voix de l'église" dans le pays, assure le Père Fero.

Agence France Presse - 26 janvier 2007


Détente à petits pas

La rencontre, jeudi, entre le Premier ministre vietnamien Nguyen Tan Dung et le pape Benoît XVI, est présentée comme un «pas nouveau et important vers la normalisation des relations bilatérales», a déclaré le Vatican dans un communiqué. L’entretien, à haute portée symbolique, n’a pas abouti à l’établissement de relations diplomatiques entre le Saint-Siège et le Vietnam, gelées depuis 30 ans. Il permet, cependant, «d’assurer de plus grands espaces de liberté religieuse pour l’Eglise catholique» du Vietnam.

Après la Chine, c’est au tour du Vietnam. Le souverain pontife poursuit la concertation entamée avec les Eglises d’Asie. Les 19 et 20 janvier, au terme d’une réunion de deux jours au Vatican, Benoît XVI a tendu la main aux autorités chinoises, «afin de permettre une vie fructueuse et pacifique à la foi de l’Eglise et de travailler ensemble pour le bien du peuple chinois». Ce jeudi, à l’issue d’un entretien privé de 25 minutes avec le chef du gouvernement vietnamen, le Vatican s’est réjoui des «progrès concrets enregistrés ces dernières années» avec les autorités communistes du Vietnam. La rencontre s’est conclue dans une atmosphère cordiale avec le traditionnel échange de cadeaux. Le pape a reçu de son hôte un vase de céramique et lui a remis des médailles du Vatican. La délégation vietnamienne s’est, pour sa part, refusée à tout commentaire devant les journalistes, rapporte la correspondante de l’AFP. Bien que les experts parlent d’une rencontre de haute portée symbolique, l’établissement de relations diplomatiques n’est toujours pas effectif. Elles sont rompues depuis 1954 avec la partie nord du Vietnam, et depuis 1975, avec le sud, après l’unification du pays sous la bannière communiste.

Dynamisme des catholiques et bon vouloir des autorités

L’allégeance au pape des catholiques du Vietnam, a longtemps été regardée par certains responsables, comme une menace pour la suprématie du parti communiste au pouvoir. Mais, depuis la politique d’ouverture entamée au début des années 1990, la situation des catholiques s’est améliorée. En témoigne l’ordination, en novembre 2005, de 57 nouveaux prêtres, lors d’une cérémonie fastueuse, célébrée à Hanoï par le cardinal Crescenzio Sepe, préfet de la congrégation pour l’évangélisation des peuples. Cette vitalité est certes imputable au dynamisme des catholiques du Vietnam, mais aussi au bon vouloir des autorités. Sur les 82 millions d’habitants, les catholiques représentent 8% de la population et sont répartis en 25 diocèses (10 au nord, 6 au centre et 9 au sud).

La première évangélisation connue au Vietnam remonte à 1615. En 1988, Jean-Paul II a procédé à la canonisation de 117 catholiques, martyrisés pour leur foi au Vietnam, aux XVIIIe et XIXe siècles. 96 d’entre eux étaient vietnamiens, dont quarante religieux. A leurs côtés, dix prêtres français des Missions étrangères de Paris. Après les accords de Genève, en 1954, scellant la partition du pays, les catholiques fuient le Nord-Vietnam communiste pour s’installer au sud pro-français. En 1975, au moment de l’unification, tous les missionnaires repartent. C’est le début d’une période sombre pour les prêtres qui se voient empêchés d’exercer leur ministère. Beaucoup sont emprisonnés et les rassemblements religieux interdits, jusqu’au dégel amorcé à partir de 1990, même si Jean-Paul II n’était guère apprécié par Hanoï, tant il était considéré comme le fosseyeur du communisme. Néanmoins, les catholiques sont mieux vus par le parti. Ils inquiètent moins que les protestants, plus difficiles à cerner de par la multiplicité des communautés. L’Eglise catholique répond à une hiérarchie claire. «C’est plus facile pour les Vietnamiens de traiter avec les catholiques. Il y a le Vatican et sa structure», relève un diplomate à Hanoï. «A l’inverse, les protestants n’ont pas d’interlocuteur. Chaque église est différente de l’autre».

«Combler le saut générationnel»

En septembre 2005, le rapport de l’assemblée annuelle des évêques vietnamiens se réjouissait que «le nombre d’ordinations de prêtres ait augmenté, que les formalités relatives à l’édification des églises soient plus aisées et que les activités religieuses soient revenues à la normale». Mais c’est justement en ce qui concerne les effectifs des prêtres que le bât blesse. D’où l’urgence pour Benoît XVI de rouvrir le canal diplomatique, afin de combler au plus vite la pénurie due au «saut générationnel». Les années de communisme intransigeant ont bloqué le renouvellement des ecclésiastiques. Contrairement à la Chine où l’Eglise officielle contourne Rome en matière d’ordination épiscopale, les évêques vietnamiens sont bien nommés par le Saint-Siège, mais seulement après avoir obtenu l’autorisation du gouvernement de Hanoï.

The Hung Pham, journaliste vietnamien à RFI est installé à Paris, depuis 1990. De parents catholiques, catholique lui-même, ses trois enfants sont baptisés, il explique que l’Eglise catholique, «contribue activement à l’action sociale au Vietnam. Là où l’Etat ne remplit pas son rôle», ajoute Hung, «l’Eglise catholique prend le relais, en hébergeant les enfants des rues, en s’occupant des malades du sida, ou encore de l’éducation». Ce qu’a exprimé clairement, ce matin, Benoît XVI souhaitant que «les catholiques puissent apporter toujours plus efficacement leur contribution positive pour le bien commun du pays (…) et l’assistance caritative en faveur des plus faibles». Selon Mgr Claudio Maria Celli qui a longtemps dirigé la délégation vaticane à Hanoï : «L’Eglise catholique au Vietnam est libre, comme l’oiseau est libre dans la cage. L’exercice consiste à élargir le plus possible la taille de cette cage».

Par Françoise Dentinger - Radio France Internationale - 26 janvier 2007