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Une figure du bouddhisme veut réconcilier le nord et le sud du Vietnam

HO CHI MINH-VILLE - Plus de trente ans après la fin de la guerre, il est temps de mettre un terme aux rancoeurs entre le nord et le sud du Vietnam, estime Thich Nhat Hanh, figure internationale du bouddhisme et fondateur de la communauté du Village des pruniers en France.

Thich Nhat Hanh est de retour pour quelques mois dans son pays. Contraint à l'exil en 1967 par le régime pro-américain du sud-Vietnam, le moine a créé en France le Village des pruniers, un des plus grands centres bouddhistes d'Europe, situé aux confins de la Dordogne et du Lot-et-Garonne (sud-ouest). Vendredi matin, il a ouvert sous le regard de la police une grande cérémonie "de réconciliation" dans une pagode bondée de Ho Chi Minh-Ville, l'ex-Saïgon. Cette cérémonie, autorisée par le régime, doit durer trois jours. Pour Thich Nhat Hanh, il faut parler des souffrances que les deux parties, communistes au nord et pro-américains au sud, ont engendré pendant la guerre. Le conflit, qui s'est achevé en 1975, a fait 3 millions de morts côté vietnamien et 58.000 dans le rang des militaires américains.

"Il faut reconnaître cette souffrance pour la transformer et ne pas la transmettre aux générations futures", a expliqué Thich Nhat Hanh dans un entretien à l'AFP. Plus de trente ans après la réunification du pays, "dans le sud le sentiment d'un contrôle du nord reste", souligne-t-il. La rivalité est encore grande entre Hanoï, la capitale politique du nord et Ho Chi Minh-Ville, la capitale économique du sud. Après Ho Chi Minh-Ville, Thich Nhat Hanh compte organiser le même type de cérémonies à Hué (centre) puis Hanoï. Mais parler des souffrances du passé reste difficile.

Parce que, raconte le moine, certains au sein du parti communiste au pouvoir "ne sont pas prêts à reconnaître les victimes des communistes pendant la guerre" et la police "ne veut pas que nous parlions trop des +boat people+", ces Vietnamiens qui ont fui le régime au péril de leur vie. "Le gouvernement veut donner l'image que la guerre était juste une guerre d'indépendance. Il n'a jamais accepté (le fait) que ce soit une guerre civile entre le nord et le sud", poursuit-il.

La visite du moine n'a pas non plus fait que des heureux parmi la dissidence. L'Eglise bouddhiste unifiée du Vietnam (EBUV), interdite depuis 1981 pour avoir refusé de se soumettre au contrôle du parti communiste, estime que le moine se fait manipuler par Hanoï. Sa visite permet au régime de donner une "fausse impression de liberté religieuse" dans le pays, accuse Vo Van Ai, président du Bureau international d'information bouddhiste (IBIB), qui assure depuis Paris la communication de l'EBUV. Le numéro un de l'EBUV, Thich Huyen Quang, n'est en revanche "pas autorisé à quitter son monastère de Binh Dinh (centre) pour aller suivre un important traitement médical à Saïgon", rappelle Vo Van Ai. Jeudi, la police vietnamienne a brièvement interpellé une délégation de trois membres de l'organisation norvégienne des droits de l'homme Rafto, qui souhaitaient venir remettre un prix au numéro deux de l'EBUV, Thich Quang Do.

Face aux critiques, Thich Nhat Hanh, évoque une "façon de faire différente" de celle de l'EBUV, qui s'inscrit plus dans le "dialogue", explique-t-il. Le moine assure de toute façon l'EBUV de son "soutien" dans son combat pour "opérer librement" au Vietnam. Thich Nhat Hanh a lui-même été "persona non grata" auprès du régime communiste pendant près de trente ans. Le moine était revenu pour la première fois dans son pays il y a deux ans, lors d'une visite déjà très critiquée par la dissidence.

Agence France Presse - 17 mars 2007