Les universités font leur Dôi Moi
L'enseignement supérieur du Vietnam, qui cherche à se rénover, souhaite
que soient mises en place de nouvelles politiques. Les deux maîtres mots
de cette réforme en cours : autonomie et responsabilité.
Quotas d'étudiants, programme de formation, autofinancement, qualité de
formation... Autant de questions cruciales pour l'enseignement supérieur à
l'heure où doit s'y opérer un véritable renouvellement. Au sein du monde
éducatif, un grand débat s'annonce.
Les 2 universités nationales de Hanoi et de Hô Chi Minh-Ville ont demandé
au ministère de l'Éducation et de la Formation de supprimer les quotas
d'étudiants lors des concours d'entrée aux universités. Selon le recteur
adjoint de l'Université nationale de Hanoi, Pham Trong Quat, la dépendance
des universités vis-à-vis du ministère de l'Éducation et de la Formation,
en ce qui concerne les effectifs d'étudiants, limite leur autonomie et
donc leur responsabilité.
Cette opinion est partagée par plusieurs responsables d'établissements. Le
doyen de l'Université de Dà Nang, Bùi Van Ga, précise: " La distribution
des quotas d'étudiants limite la capacité des universités de rajuster
d'une façon souple leur plan de formation. Le ministère de l'Éducation et
de la Formation révise seulement la norme d'examen de qualité de
l'enseignement supérieur appliquée pour chaque période. Les universités se
baseront sur cette norme pour établir des quotas et l'annoncer aux médias.
Le ministère contrôlera ces chiffres selon la norme". "Ayant acquis une
autonomie en la matière, les universités pourront elles-mêmes décider de
leur envergure de formation et de leur plan de développement. Elles
veilleront également à la qualité de la formation, assurant ainsi leur
réputation ", ajoute-t-il.
Le recteur adjoint de l'Université nationale de Hô Chi Minh-Ville, Nguyên
Duc Nghia, indique également : " Les universités devraient être autonomes
en ce qui concerne le programme de formation, la gestion du personnel et
les finances. Avec cette autonomie, les capacités des universités seront
libérées ".
"Pourtant, l'autonomie ne sera accordée qu'aux universités suffisamment
fortes ", prévient le doyen de l'Université de Cân Tho, Lê Quang Minh.
Les faiblesses reconnues
Face aux propos de plusieurs doyens d'universités, les responsables du
ministère de l'Éducation et de la Formation reconnaissent leurs faiblesses
: "Ces dernières années, la qualité et l'efficacité de l'éducation sont
restées modestes". Tels sont les dires du vice-ministre Bành Tiên Long. Et
d'ajouter : "Nous sommes à un point de départ estimé bas, tant sur le plan
de la formation des ressources humaines pour le développement national que
sur celui de l'intégration internationale".
Le vice-Premier ministre Pham Gia Khiêm explique quant à lui que "le
retard dans le renouveau des politiques constitue la première cause". "La
détermination de la politique éducative est influencée par le système des
subventions budgétaires. Ces derniers temps, nous n'avons pas osé régler
certains problèmes, tels l'élargissement de l'envergure de l'enseignement
supérieur" précise-t-il, ajoutant par la même que "l'enseignement a besoin
de politiques renouvelées et d'autonomie".
Séparer l'enseignement de l'évaluation
"Pour un renouvellement fondamental et complet, le ministère de
l'Éducation et de la Formation a défini des tâches et mesures précises",
fait savoir le vice-ministre Bành Tiên Long. Dans l'immédiat, la sélection
des candidats inscrits aux universités sera la première priorité.
Les universités bénéficieront en 2008 d'une autonomie dans la sélection de
leurs étudiants. Concernant le processus de formation, le système de
modules sera appliqué en 2010. En 2007, un programme " cadre " sera
déployé. Les universités pourront alors concevoir elles mêmes leur
programme. Outre le contenu, la méthode d'enseignement devra être
également renouvelée. La branche renforcera les examens et l'assurance de
qualité avec la création d'un centre d'examen et de contrôle dans chaque
université. Cette mesure permettra de séparer l'enseignement de
l'évaluation.
Le renouvellement de la gestion constitue l'autre grand chantier. La
gestion administrative sera renforcée tandis que les universités auront
plus d'autonomie pour leurs activités. Le ministère n'effectuera que la
tâche de gestion administrative, d'examen et d'inspection. Les universités
devront en outre établir un Conseil d'université pour augmenter la
démocratie et la responsabilité.
La troisième mesure concerne le renouvellement de la politique financière.
Les frais d'études seront répartis entre l'État, la communauté et
l'étudiant. Les universités disposeront alors de plus d'autonomie en ce
qui concerne les finances.
La mesure suivante sera le lien entre l'enseignement, la recherche
scientifique et la coopération internationale. Et enfin, la dernière
mesure, le développement du contingent d'enseignants et gestionnaires. Les
universités pourront directement recruter des enseignants pour parvenir à
l'indice: un enseignant pour 20 étudiants. La pénurie d'enseignants et le
manque de temps pour la recherche scientifique seront également réglés.
L'un des objectifs majeurs du projet de développement de l'enseignement
supérieur, c'est l'intégration internationale. "Dans un premier temps,
nous allons nous concentrer sur l'intégration régionale", indique le
vice-Premier ministre Pham Gia Khiêm. "La mesure la plus importante
favorisant le renouvellement véritable de l'enseignement supérieur, c'est
le renouvellement de l'esprit de gestion au niveau des autorités du Parti,
du ministère de l'Éducation et de la Formation et jusqu'aux responsables
des universités", conclut-il.
La conférence quinquennale des 350 doyens d'universités
La conférence quinquennale des doyens des universités et écoles
supérieures s'est déroulée les 10 et 11 mai à Hanoi, réunissant 350
responsables des établissements du pays. Présidée par le vice-Premier
ministre Pham Gia Khiêm, cette réunion est la première à être tenue après
l'approbation en juillet 2005 par le gouvernement du projet de
développement de l'enseignement supérieur pour la période 2006-2020.
Environ 300 universités et écoles supérieures
L'enseignement supérieur du Vietnam a été fondé dans les années 50 du
dernier siècle alors qu'une série de grandes universités a été créée entre
1956 et 1960 tant dans le Nord et le Sud du pays. Jusqu'aujourd'hui, le
pays compte près de 270 universités, instituts et écoles supérieures
publiques, plus de 40 établissements privés. Le nombre d'étudiants est
d'environ 1,35 million.
Par Hoàng Hoa - Le Courrier du Vietnam - 28 Mai 2006
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