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Hô Chi Minh-Ville : je crée l'attraction au volant de ma traction

Cette tendance, on l'avait déjà observée avec les scooters, mais voilà qu'elle gagne aussi les automobilistes : l'amour pour les vieilles mécaniques des années 40, 50 ou 60 du dernier siècle. Vrais passionnés ou simples frimeurs, aucun de ces conducteurs n'échangerait sa traction avant ou sa Tatra T87 contre une Ford Focus ou une Toyota Camry.

On croyait les Saïgonnais beaucoup plus intéressés par les derniers modèles de chez Mercedes ou Toyota, que par les vieilles autos des années 40 ou 50 du dernier siècle. Au contraire, maintenant, on se les arrache ces tacots au look antédiluvien qui ont connu la colonisation française, la présence américaine et tout ce qui va avec. Car, aujourd'hui encore, des voitures dites "de collection" arpentent à leur rythme les rues de la bouillonnante mégalopole. La doyenne, peut être, est une Tatra T87, fabriquée en 1936 et importée au Vietnam durant la Seconde Guerre mondiale. Unique exemplaire en Asie du Sud-Est, elle a été acquise il y a bien longtemps par Chinh, un Saigonais, au prix de 30.000 dollars malgré un état pitoyable. D'après lui, ce tacot est une sorte de "témoin muet de la colonisation française". À l'époque, seules les huiles de l'armée roulaient avec. Et bien que son propriétaire passe pour un tantinet excentrique, sa Tatra T87 constitue une sorte de témoignage d'une période révolue, un peu à la manière de l'architecture coloniale surannée disséminée un peu partout dans la ville qui, soit dit-en passant, s'harmonise parfaitement avec ces vieilles carrosseries. Le problème, c'est que son auto porte toujours la plaque d'immatriculation de l'ancien régime ! Ainsi, Chinh n'ose-t-il sortir qu'à la brunante, lorsque tous les chats sont gris. Il espère que, dans un proche avenir, une fois qu'il aura reçu l'aval des autorités, il pourra circuler en plein jour sans craindre de se retrouver nez à nez avec la maréchaussée. Peut être aussi est-il temps pour lui de retirer l'ancienne plaque pour ne pas froisser les susceptibilités, de ces autorités-là notamment. Simple suggestion...

La Mercedes-Benz 190 SL fait elle aussi partie de ces vielles guimbardes que l'on peut croiser sur les grands boulevards de la mégalopole, et qui font tourner bien des têtes. Les 2 uniques exemplaires recensés dans la ville ont été importés en 1958-1960, et appartenaient jusqu'à tout récemment à Cao Van Phu, un Français d'origine vietnamienne, directeur de la compagnie Technet. Certes, au Vietnam, elles n'ont guère de valeur, mais ailleurs dit-on, elles vaudraient 50.000, voire 100.000 dollars pièce ! Il n'était pourtant pas question pour Phu de s'en séparer, malgré toutes les difficultés qu'il éprouvait à trouver des pièces de rechange... Il a dû pourtant se résoudre à en revendre une, avec regret, parce qu'il n'arrivait pas à la remettre à neuf. "Ce n'est pas facile d'avoir d'autres loisirs quant on est passionné de vieilles autos comme moi. Elles nous bouffent tout notre temps !", a avoué Phu, qui a dû faire venir des pièces d'Allemagne. "À présent, mon véhicule est en parfait état de marche. Jamais il ne me lâche en rase campagne, et pourtant j'en ai fait des kilomètres !". Mais, au fait, d'où vient-il cet engouement grandissant pour les automobiles d'antan... Serait-ce le goût pour les belles carrosseries, une certaine nostalgie du passé ou, plus prosaïquement, le désir de ne pas passer inaperçu ?

Le Courrier du Vietnam - 15 Décembre 2006