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Le Vietnam mise sur l'OMC pour achever sa mue

Les 149 pays membres de l'Organisation mondiale du commerce ont approuvé mardi à l'unanimité l'adhésion du Vietnam qui parachève ainsi son intégration dans la communauté mondiale. L'accélération des réformes pourrait risque toutefois de déstabiliser le pays.

Avec l'accession à l'Organisation mondiale du commerce, officiellement approuvée mardi à Genève à l'unanimité, le Vietnam et ses 84 millions d'habitants sont enfin récompensés de leurs efforts. Comme le fait remarquer Matthieu Salomon, spécialiste du pays, « au-delà de la dimension économique, il faut d'abord souligner l'importance politique de cette adhésion. Les Vietnamiens sont très fiers d'avoir pu intégrer l'OMC plus rapidement que les Chinois, à qui il a fallu quinze ans de négociations. Ils ont maintenant le sentiment d'appartenir pleinement à la communauté mondiale. Il ne faut pas oublier que la fin de la guerre, en 1975, n'est pas si lointaine ». Depuis vingt ans et le début de la politique de libéralisation, le pays n'a pas ménagé sa peine pour en arriver là.

Le mouvement de privatisations des entreprises publiques, lancé au tournant du siècle, a déjà touché plus de la moitié des entreprises d'Etat. A la fin de l'année dernière, une loi a donné aux investisseurs étrangers les mêmes droits qu'aux locaux. Et des pans entiers de l'économie se sont ouverts aux capitaux étrangers. Résultat, les investissements directs étrangers sont sur des rythmes d'augmentation à deux chiffres : +25% en 2005, +40% sur les dix premiers mois de 2006, à près de 6,5 milliards d'euros. Et la croissance économique du Vietnam est la plus forte en Asie, après la Chine : 7% en moyenne depuis 2000, 8,5% l'année dernière. Résultat, la pauvreté a connu une réduction spectaculaire et une classe moyenne a fait son apparition « avec de nouvelles aspirations, de nouveaux désirs qui se complexifient chaque jour un peu plus. Nous sommes loin des besoins basiques d'il y a ne serait ce que trois ou quatre ans », comme l'observe Fabrice Carrasco, directeur de TNS World Panel Vietnam.

Le pari n'est pourtant pas encore gagné. Le Vietnam a négocié pied à pied pour tenter de limiter les effets négatifs de son entrée à l'OMC. Il a réussi à éviter de s'engager à respecter les normes internationales du droit du travail, mais a dû renoncer à certaines subventions agricoles. Il a aussi voté un plan progressif de diminution des droits de douane qui va accroître la vulnérabilité de son industrie. Et la concurrence exacerbée qui va découler de cette pleine intégration au jeu du libre échange comporte des risques. Les entreprises du secteur public, encore tributaires des réflexes de l'économie planifiée, sont les plus menacées. Kevin Snowball, gérant du fonds PXP basé à Ho Chi Minh-Ville, se montre plutôt optimiste : « le Vietnam a prouvé sa faculté d'adaptation, en tirant profit de l'accord bilatéral conclu avec les Etats-Unis en 2001, notamment dans le secteur textile ».

Mais d'autres sont plus réservés et soulignent que les faillites d'usines seront inévitables, et la relative paix sociale pourrait être troublée. Il y a un peu moins d'un an, une vague de grèves touchant surtout les entreprises taiwanaises et coréennes, avait d'ailleurs contraint le gouvernement à relever de près de 40% le salaire minimum. Comme l'observe finalement Matthieu Salomon, « les changements ont été suffisamment graduels pour préserver l'équilibre de la société jusqu'à présent. Mais avec l'OMC, le pouvoir va passer le test final ».

Par Thomas Bronnec - L'Expansion - 7 Novembre 2006


Ce que le Vietnam devra respecter

Le traité d'adhésion du Vietnam à l'Organisation mondiale du commerce, approuvé mardi à Genève par les 149 pays membres, comprend quelque 900 pages qui reprennent tous les engagements pris par Hanoi en matière d'ouverture de son marché intérieur. Pour la majorité des produits importés, le Vietnam s'est engagé à plafonner ses droits de douane à des niveaux compris entre 0% et 35%, avec un calendrier d'application qui se déroule jusqu'en 2014. Parmi les produits qui feront l'objet des plus fortes réductions, on trouve le tabac, les alcools, le café ou encore les automobiles.

Le Vietnam pourra maintenir des contingents tarifaires provisoires sur certains produits comme les oeufs, le tabac, le sucre et le sel. En agriculture, Hanoï a promis de ne pas subventionner ses exportations, mais pourra continuer à verser des aides sans aucune limite tant que ces soutiens ne faussent pas la concurrence internationale. Comme les autres pays en développement, le Vietnam pourra verser des subventions faussant les échanges - soutiens liés aux prix ou à un niveau de production - à hauteur de 10% de la valeur de sa production agricole, plus une enveloppe annuelle de 3.961 milliards de dongs, soit environ 250 millions de dollars.

Le pays s'est engagé à ouvrir son secteur des services, mais pourra provisoirement limiter la participation de capitaux étrangers, par exemple dans les télécommunications où cette limite pourra représenter 49% ou 65% du capital d'une entreprise vietnamienne. Plus généralement, le Vietnam devra respecter les règles du commerce international, notamment en ce qui concerne les entreprises publiques du secteur commercial, qui devront fonctionner de manière concurrentielle sans ingérence de l'Etat. Hanoi devra notifier annuellement l'OMC de son programme de privatisation, qui devra être mené de façon transparente.

L'Expansion - 7 Novembre 2006