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Cambodge-Vietnam : retour d'amitié entre frères ennemis

Le souverain khmer Sihamoni est en visite à Hanoi jusqu'à samedi.

BANGKOK - «Nouvel élan», «amitié traditionnelle», «aspiration commune des deux peuples»... Comme aux meilleurs temps de la solidarité communiste khméro-vietnamienne des années 80, les formules fleurissent dans la presse de Hanoi à l'occasion de la visite au Vietnam, de jeudi à samedi, du roi Sihamoni du Cambodge. Indéniablement, cette première visite du jeune souverain, qui a succédé à son père Norodom Sihanouk en octobre 2004, marque un progrès dans les relations entre les deux frères ennemis du sud-est asiatique. Le roi Sihamoni est soucieux d'établir des relations plus harmonieuses entre le Cambodge et ses voisins : non seulement le Vietnam, mais aussi le Laos et la Thaïlande où il se rendra en juin pour les soixante ans de règne du monarque thaïlandais.

Son père, Sihanouk, n'a jamais porté dans son coeur les Vietnamiens qui avaient entraîné son pays dans la tourmente de la seconde guerre d'Indochine, puis l'avaient occupé militairement pendant dix ans après la chute du régime khmer rouge, en janvier 1979. Encore aujourd'hui, les blessures de l'occupation sont mal refermées : les Yuon (mot vaguement péjoratif par lequel les Khmers désignent les Vietnamiens) sont souvent accusés par les Cambodgiens d'être responsables de bien des maux du pays.

Malgré l'embellie actuelle, les relations entre les deux pays restent épineuses, comme en témoigne la tempête de protestations qu'a soulevée la signature par le Premier ministre cambodgien Hun Sen, en octobre, d'un accord frontalier avec le Vietnam. Cinq militants des droits de l'homme et des journalistes avaient été arrêtés, et certains condamnés à de lourdes peines de prison, pour avoir accusé Hun Sen d'avoir «vendu des portions du territoire cambodgien» au Vietnam. Ils ont été relâchés sur demande des Etats-Unis, mais le message est passé : le sujet des frontières est tabou. Quelques semaines après ces incidents, la visite historique de Sihamoni au Vietnam est perçue par beaucoup comme une caution implicite à l'accord controversé.

Par Arnaud Dubus - Libération - 17 Mars 2006


Sihamoni au Vietnam pour solidifier la réconciliation

HANOI - Le roi du Cambodge Norodom Sihamoni est arrivé au Vietnam jeudi pour la première fois depuis son intronisation fin 2004, pour une visite destinée à souder des relations bilatérales qui n'ont cessé de s'améliorer ces derniers mois. Le monarque, 52 ans, n'a pas la stature politique de son père et prédécesseur sur le trône, Norodom Sihanouk, dont la dernière visite à Hanoï remonte à 1995. Mais les deux pays n'ont eu de cesse ces derniers jours de présenter sa visite comme un signe supplémentaire de leur rapprochement. Le Vietnam avait envahi le Cambodge en 1978 pour renverser le régime khmer rouge de Pol Pot, avant de s'installer dix ans au Cambodge. Aujourd'hui, Hanoï et Phnom Penh saluent dans un communiqué commun leurs «bon voisinage, amitié traditionnelle et stabilité durable».

Sihamoni est arrivé peu après midi (05H00 GMT) à Hanoï, accueilli à l'aéroport Noi Bai par des jeunes agitant des drapeaux des deux pays. Il doit s'entretenir avec les trois plus hauts-responsables vietnamiens, le premier ministre Phan Van Khai, qui était à Phnom Penh il y a quelques jours, le président Tran Duc Luong et le secrétaire général du Parti communiste vietnamien, Nong Duc Manh. Sihamoni, ancien danseur qui a passé le plus clair de son temps en Europe, dispose d'un passé plus neutre que son père. Sihanouk était volontiers dur avec Hanoï, exploitant dans le royaume un fort sentiment anti-vietnamien nourri par l'histoire et des questions territoriales. Les relations se sont nettement améliorées depuis que les deux pays ont signé l'an passé un important accord frontalier, réglant ainsi un dossier extrêmement sensible hérité de la période coloniale.

«La visite intervient à une période où les problèmes en suspens entre les deux pays ont été réglés,» note jeudi dans le quotidien Vietnam News l'ambassadeur du Cambodge à Hanoï, Long Kem. «Le souhait des deux peuples est d'avoir une frontière de paix et d'amitié pour développer les relations économiques et commerciales». Les voisins ont désormais pour ambition d'augmenter de 40% leurs échanges commerciaux pour qu'ils atteignent un milliard de dollars d'ici 2010.

Un diplomate vietnamien en charge du dossier soulignait jeudi que Sihamoni n'aborderait aucun sujet sensible. «Compte tenu de la situation politique complexe au Cambodge, le roi ne discutera pas des questions politiques avec les responsables vietnamiens», a-t-il indiqué à l'AFP. Ces derniers mois, plusieurs opposants ont été incarcérés à Phnom Penh après avoir accusé le premier ministre Hun Sen d'être un «pantin» de Hanoï et d'avoir cédé des terres au Vietnam.

Sihamoni s'est aussi rendu cette semaine au Laos, où l'ancien ambassadeur de l'UNESCO (organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture) a visité le site de Louang Prabang, inscrit au patrimoine mondial. Il doit aussi visiter la Baie d'Ha Long, à l'est de Hanoï, autre site de l'UNESCO.

Par Frank Zeller - Agence France Presse - 16 Mars 2006


La visite d'Etat au Vietnam du roi du Cambodge revêt une signification profonde

HANOI - Le roi Norodom Sihamoni du Cambodge fera cette semaine sa première visite d'Etat au Vietnam destinée à donner une nouvelle impulsion aux efforts concertés des deux pays en vue de renforcer leurs relations de bon voisinage et la stabilité à long terme. L'Agence vietnamienne d'information (AVI) a interviewé l'ambassadeur cambodgien au Vietnam Long Kem sur cet évènement.

AVI: Quelle signification revêt cette première visite officielle au Vietnam du nouveau roi cambodgien Norodom Sihamoni?

L'ambassadeur Long Kem: Cette visite officielle au Vietnam de sa Majesté le roi du Cambodge Norodom Sihamoni revêt une signification profonde et est une manifestation de l'amitié vietnamo-cambodgienne. La visite a lieu au moment où les entraves dans les relations bilatérales ont été dégagées. Le problème frontalier restait longtemps en suspens pour les deux pays. Les deux peuples aspirent à construire leurs frontières de paix, d'amitié et de transparence pour développer plus vigoureusement leurs liens économiques et commerciaux. Maintenant, cette question a été réglée, il reste à réaliser les accords conclus.
De par la signature d'un accord complémentaire au traité frontalier terrestre bilatéral de 1985, le gouvernement cambodgien a dû surmonter d'innombrables difficultés et défis. Le gouvernement a rassemblé tous les soutiens de la population, de l'Assemblée nationale à cette fin. Les choses se sont finalement bien passées.
Sur la base des relations traditionnelles de solidarité, d'amitié, de voisinage séculaire entre les deux pays, et de la politique extérieure de l'ancien roi Norodom Sihanouk, le roi Norodom Sihamoni préconise d'édifier une relation bilatérale de coopération et d'amitié. Cette position a été vivement saluée par les leaders vietnamiens. Ce déplacement du roi Sihamoni vise à répondre à la visite au Cambodge en 2005 du secrétaire général du Parti communiste vietnamien Nông Duc Manh, à s'entretenir avec les dirigeants vietnamiens, à visiter le Vietnam et son peuple pour resserrer les liens bilatéraux.
Je suis convaincu que sur la base des belles relations de solidarité, d'amitié de longue date entre les deux pays, les rapports vietnamo-cambodgiens continueront de s'épanouir. Ces liens traditionnels profiteront certainement à un essor plus vilgoureux des relations économiques et commerciales entre le Vietnam et le Cambodge dans le temps à venir.

AVI: Les deux pays assistent à des échanges de visites de haut niveau de leurs dirigeants, notamment en mars. Qu'est-ce qu'elles présentent pour les liens d'amitié et de coopération bilatéraux?

L'ambassadeur Long Kem: J'en suis ravi et hautement apprécie les résultats de ces visites. Les dirigeants de nos deux pays ont échangé des visites bilatérales, les services et les provinces à la frontière vietnamo-cambodgienne ont accéléré la coopération multiforme entre les deux pays, sur la base des belles relations de coopération et d'amitié de longue date. C'est justement cette coopération intégrale, ce partage du même sort et des bonheurs au fil des périodes qui ont rendu plus étroites la solidarité et l'amitié entre les deux pays. Ceci dit, quand des questions émergent dans les relations bilatérales, les hauts dirigeants ainsi que les gouvernements des deux pays ont conjugué les efforts pour les régler sur la base de la solidarité et de l'amitié vietnamo-cambodgiennes. Cela est crucial, répondant à l'aspiration des deux peuples et des deux gouvernements. Les cadres, les habitants du niveau central à l'échelon local ont bien possédé cette position.
Ainsi, avec l'échange régulier de visites de haut rang et entre les ministères, services et localités, ainsi qu'avec l'intensification des contacts entre les organisations de masse et les milieux d'affaires des deux pays, les relations d'amitié, de coopération et de bon voisinage traditionnelles entre le Cambodge et le Vietnam se sont développées de façon intégrale, tant en profondeur qu'en ampleur, répondant à l'aspiration et aux intérêts des deux peuples.

AVI : Récemment, les deux pays se sont entendus de porter à un milliard d'USD la valeur des échanges commerciaux bilatéraux dans les temps qui viennent. Selon vous, qu'est-ce que le gouvernement et les milieux d'affaires des deux pays doivent faire pour atteindre cet objectif ?

L'ambassadeur Long Kem: La valeur des échanges commerciaux entre le Vietnam et le Cambodge a augmenté d'année en année. En 2005, elle était de 700 millions d'USD, soit une hausse de 15% par rapport à l'année précédente. Je suis convaincu que, dès 2006, nous pouvons atteindre la barre du milliard d'USD.
D'après moi, d'une part, les deux parties doivent continuer à maintenir et à développer leurs relations d'amitié et de solidarité stable et durable. Il s'agit d'un facteur important pour encourager les businessmen des deux pays dans leurs activités d'investissement et d'affaires. D'autre part, les deux pays doivent poursuivre la coopération sur le problème des frontières, édifier une zone frontalière stable et développée pour attirer les investisseurs et étendre les rapports commerciaux bilatéraux. Enfin, les deux gouvernements doivent favoriser les rencontres entre les entreprises privées afin d'établir leur partenariat.
Ces derniers temps, les produits du Vietnam regagnent pas à pas leur position sur le marché cambodgien. La qualité des marchandises vietnamiennes est élevée avec le design renouvelé. En général, la plupart de ces produits peuvent concurrencer les importations depuis l'Ouest du Cambodge. Pour conquérir de façon stable et durable le marché cambodgien, le Vietnam doit continuer à améliorer la qualité de ses marchandises, à réduire leur coût, à améliorer leur design, afin que ses produits puissent être compétitifs à côté des importations de Thaïlande, Singapour...
Par ailleurs, la partie vietnamienne devra organiser plusieurs foires de produits vietnamiens au Cambodge. En 2005, trois foires vietnamiennes ont attiré une participation d'un très grand nombre de Cambodgiens qui ont achété tous les produits exposés.
La partie cambodgienne continuera à soutenir les compagnies et entreprises en coopération avec les partenaires vietnamiens dans la production agricole, sylvicole et aquicole. De concert avec les priorités accordées par le Vietnam aux produits du Cambodge, je suis convaincu que, dans les temps qui viennent, la valeur des échanges commerciaux bilatéraux continuera son augmentation.

Agence Vietnamienne d'Information - 15 Mars 2006