Bruxelles veut taxer en douceur les chaussures de Chine et Vietnam
BRUXELLES - La Commission européenne a proposé jeudi d'imposer des taxes anti-dumping de moins de 20% sur certaines chaussures de Chine et du Vietnam, une mesure soigneusement calibrée pour défendre les industriels européens sans offenser Pékin ni pénaliser les consommateurs.
Le commissaire européen au Commerce Peter Mandelson a annoncé jeudi qu'il proposerait de frapper de taxes équivalentes à 19,4% du prix à l'importation les chaussures en cuir chinoises et de 16,8% les chaussures en cuir vietnamiennes, lors du comité anti-dumping des 25 le 9 mars prochain.
Ces mesures se justifient par la découverte, à l'issue d'une enquête menée d'avril 2004 à mars 2005 par la Commission, de "preuves avérées d'intervention publique, de dumping et de dommage", a affirmé le commissaire.
M. Mandelson a voulu "corriger" les dommages que cause cette "concurrence déloyale" aux fabricants européens, encore nombreux dans les pays du sud comme l'Italie.
"Je ne dis pas que c'est de la concurrence déloyale parce que les salaires ou d'autres coûts sont moins élevés en Chine ou au Vietnam: ça, c'est de la concurrence dure, mais pas déloyale", a-t-il souligné. "Ce que je dénonce, ce sont des subventions déguisées, et une main d'oeuvre qui est exploitée même selon les normes du pays exportateur".
Mais les mesures proposées par le commissaire sont très mesurées.
Elles ne limitent pas les importations, contrairement à ce qui avait été décidé lorsque les ventes de textiles chinois avaient explosé dans l'UE après l'abolition des quotas le 1er janvier 2005, déclenchant un conflit de plusieurs mois avec Pékin.
Le commissaire européen a d'ailleurs pris soin jeudi de ménager les Chinois.
"Je suis déterminé à développer le commerce bilatéral et les investissements entre la Chine et l'Europe ainsi qu'avec d'autres pays asiatiques, y compris le Vietnam", a-t-il insisté.
Il a souligné aussi que, malgré l'existence d'une série de procédures anti-dumping de l'UE contre des produits chinois, elles ne portaient au total que sur moins de 2% d'un commerce UE-Chine "en pleine expansion".
Les taxes proposées par M. Mandelson ne concernent par ailleurs ni les chaussures de sport ni les chaussures pour enfants, et ne devraient frapper que 9% des 2,5 milliards de paires de chaussures vendues au total annuellement dans l'UE.
Le commissaire a justifié l'exclusion des chaussures de sport par une production européenne désormais marginale sur ce créneau, et l'exclusion des chaussures d'enfants par sa volonté d'agir "dans l'intérêt des familles avec des jeunes enfants".
Enfin, ces taxes ne devraient entrer en vigueur que progressivement. M. Mandelson suggère qu'elles démarrent à 4% seulement à partir du 7 avril pour ne s'appliquer à plein qu'en octobre, date à laquelle elles pourraient être renouvelées pour cinq ans.
Au final, ces mesures ne devraient avoir qu'un impact marginal sur les prix au détail.
Vu le prix d'importation moyen actuel de ces chaussures évalué à 8,5 euros, une taxe de 20% entraînerait une hausse de 1,70 euro sur le prix en magasin, qui se situe entre 30 et 100 euros, selon les évaluations de Bruxelles. Une hausse théorique, les distributeurs pouvant choisir d'absorber cette hausse sur leurs marges ou leurs autres ventes.
M. Mandelson a navigué entre les intérêts divergents des détaillants de chaussures, des industriels qui fabriquent encore sur le territoire européen, des grandes marques internationales qui ont largement délocalisé leur production en Asie, et des consommateurs.
Le Bureau européen des unions de consommateurs et l'association Eurocommerce, lobbies respectivement de consommateurs et de distributeurs, avaient d'ailleurs d'avance critiqué la Commission.
"Imposer des prix plus élevés aux consommateurs via des taxes anti-dumping est intrinsèquement inefficace" et "nuirait à la croissance économique à long terme", affirmaient-ils dans un communiqué commun.
Agence France Presse - 23 Février 2006
Le Vietnam ne mène pas le dumping de chaussures en Europe
HANOI - Les entreprises vietnamiennes n'ont pas pratiqué le dumping de chaussures en Europe, a affirmé jeudi le porte-parole du ministère vietnamien des Affaires étrangères, Le Dung.
A propos de l'information sur l'application éventuelle par la Commission européenne (CE) des taxes anti-dumping sur les chaussures vietnamiennes, M. Dung a dit:
Les entreprises de chaussures du Vietnam se fonctionnent selon les règles de l'économie marchande en exerçant une concurrence égale. Le gouvernement vietnamien n'intervient pas dans les activités commerciales de ces entreprises ni les subventionne.
Ces derniers temps, les entreprises vietnamiennes ont étroitement coopéré avec les enquêteurs de la CE. Le Vietnam souhaite que la CE donne une décision égale et impartiale sur les chaussures vietnamiennes exportées en Europe, ce pour s'abstenir à affecter les intérêts des travailleurs vietnamiens et des consommateurs européens, ainsi que le commerce de détail et l'industrie de la chaussure de l'Union européenne, dont plusieurs entreprises en opération au Vietnam.
Agence Vietnamienne d'Information - 23 Février 2006
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