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Mariages mixtes : Vietnam, pour le meilleur et pour le pire

Comment concilier les cultures occidentale et vietnamienne au quotidien ? Vietnamiennes mariées à des étrangers, ou l'inverse, de nombreux couples réalisent l'union mixte.

Le premier mot que Léa prononça fut "maman", les suivants, elle les dit en vietnamien. Le prénom de cette fille est français, mais son nom de famille à consonance vietnamienne. "On s'est partagé son état civil" s'amuse Sandrine la maman. Depuis quatre ans, elle vit à Hanoi aux côtés de Khanh, rencontré lors d'un voyage touristique. "Il était parfait francophone, ce qui a beaucoup facilité la rencontre." se souvient-elle. Majoritairement, ce sont les filles qui étudient les langues étrangères au Vietnam. Ce qui pourrait expliquer le plus grand nombre de couples vietnamienne-étranger qu'étrangère-vietnamien. La vietnamienne, menue et aux cheveux longs, correspondrait aussi aux canons de beauté occidentaux. Les vietnamiens n'auraient pas la même image aux yeux des femmes occidentales. Une idée que n'approuve pas Stéphane, installé à Hanoi avec Tin : "Parmi les expatriés, on trouve aussi plus d'hommes seuls que de femmes." Le physique reste une évidence pour d'autres. Denis, originaire de Montréal, s'est marié en décembre avec Phan Van Anh. Il a eu le "déclic" en la voyant dans la discothèque où elle travaillait. La question de la langue ne s'est pas posée: Van Anh ne parle ni anglais, ni français, et Denis ne parle pas le vietnamien. "On évite les sujets de discorde !" plaisante-t-il. Désormais, Van Anh apprend l'anglais. "On franchit les étapes une à une" souligne Denis.

Fossé culturel ouverture d'esprit

Le fossé culturel peut-être dur à franchir pour envisager une vie à deux. "On se trouve rapidement limité dans la compréhension l'un de l'autre, pense Simon, expatrié français à Hanoi depuis deux ans. C'est frustrant sur le plan de la complicité intellectuelle. Comment savoir où commence l'amour pour la personne de l'intérêt d'être avec un étranger ?" Pour les couples établis, l'incompréhension se résout si les deux parties choisissent d'aller vers le monde de l'autre. Il faut néanmoins choisir lequel de ces mondes sera le lieu de vie du couple. Khanh le mari de Sandrine n'envisageait pas de venir vivre en France; Denis et Stéphane s'étaient déjà installés au Vietnam avant leur rencontre. Thu et Yves, autre couple mixte de Hanoi, prévoient de choisir leur lieu de vie selon les futures études de Jade, leur bébé de 4 mois. Pour le père, il est important qu'elle fasse son primaire au Vietnam afin de créer des liens d'amitié avec le pays de sa mère.

Il est courant d'entendre dire que le courage revient à l'étranger dans le mariage mixte. Il intègre de nouvelles habitudes, s'il reste ici. Après la naissance du premier enfant, les grands-parents vietnamiens peuvent prendre en main la conduite du foyer. Mais les exceptions sont fréquentes. "Ma belle-mère a déclaré à mon mari qu'elle n'interviendrait pas dans notre ménage et dans l'éducation de nos enfants" souligne Sandrine. Les rapports de Denis avec sa belle-famille ne sont pas conflictuels : le père, la mère et la sœur de Van Anh sont sourds et muets. "Il faut atteindre un équilibre avec la famille, poursuivent Tin et Stéphane, en France, on souffre de l'individualisme, ici c'est plutôt l'inverse" "C'est un peu vrai que l'on se marie à la famille" admet Stéphane. Pour les enfants métisses, la synthèse des cultures se fait dès le plus jeune âge. Quand San-Alexandre, le fils de Tin et Stéphane, ne trouve pas un mot dans une langue, il le dit dans l'autre. "On fait notre cocktail pour communiquer à la maison." confie Tin. Pour l'enfant, il est plus simple de mémoriser en premier le vietnamien, langue monosyllabique. C'est en allant à l'école vers l'âge de trois ans que San-Alexandre s'est mis à davantage parler français. Thu et Yves envisagent d'apprendre chacun leur langue maternelle à Jade. Un prénom français qui désigne une chose vietnamienne. Tout un symbole.

Par Nicolas Barriquand - Le Courrier du Vietnam - 20 Mars 2005