Moyen de transport : Je n'ai besoin de personne en Minsk !
Ca pollue, ça fait du bruit et c'est plus lourd qu'un scooter, mais ceux qui l'utilisent en sont amoureux. La Minsk, une moto de légende ?
Elle porte le nom de la capitale de Biélorussie, mais s'adapte parfaitement aux climats tropicaux. La Minsk est pour ses utilisateurs "la vieille moto soviétique pétaradante". Réparée, selon sa réputation, avec "un bout de bambou et un bon coup de pied", ce modèle est l'engin idéal des baroudeurs et aventuriers. Certains d'entre eux la chevauchent pour de longs périples. "Elle est maniable, et on peut la charger sans problème", témoigne Marc Grenier. Ce français de 36 ans avait 50 kilos de bagages quand il a relié Hanoi à Bangkok en 2004. Il avalait 150 à 200 kilomètres par jour. Axel Le Gouellec et Mathieu Bringer ont eux parcouru 20 000 kilomètres, pas toujours goudronnés, lors du "Minsk Tour 2002". Soit 8 mois pour se rendre de Hanoi à Paris. Crevaisons, resserrement du pot d'échappement, ou encore "dentifriçage" du joint de culasse constituèrent le quotidien de leur vie en Minsk. "Forcément, à la longue, on se dit que l'erreur c'était de choisir cette moto." confient-ils dans le récit de leur voyage. Avant de partir, Cuong, mécanicien sur Hanoi, leur avait enseigné les quelques secrets mécaniques de leurs bécanes.
Monsieur Minsk
Cuong, installé dans la vieille ville, est un peu le Monsieur Minsk de la capitale vietnamienne. Depuis 14 ans, il achète, retape, répare, vend ces motos. "J'ai abandonné au fur et à mesure la gestion des scooters Honda pour me consacrer à ces 125 cm3" souligne Cuong, le portable visé à l'oreille. À la tête d'une équipe de sept ouvriers, il a en permanence une cinquantaine de Minsk à louer et presque autant à vendre. Achetés à des intermédiaires vietnamiens, ses véhicules viennent de Russie. Comme la toute première construite en 1945 à Moscou, la M1A, suivie en 1958 d'une version équipée d'une suspension avant télescopique, la M-101. "Elle est facile à réparer, poursuit Cuong, mais il faut tout de même avoir quelques rudiments de mécanique. Le tout, c'est de comprendre la Minsk !" Elle réserve aussi des surprises. Axel et Mathieu n'ont pas toujours saisi comment leur réparations permettaient de relancer les moteurs. Marc, prévoyant, avait emmené, dans son sac, une douzaine de bougies de rechange. Il n'en a utilisé qu'une au final. "Malgré son côté mythique, la Minsk est de plus en plus concurrencée par les modèles 125 cm3 de Honda pour les voyages touristiques montagneux", observe Cuong. D'après lui, sur ce créneau, la grand-mère soviétique des deux-roues devrait disparaître dans les deux prochaines années.
Un outil de travail
La Minsk n'est pas seulement l'apanage des baroudeurs et des expatriés. Dans le Nord du pays, nombre d'habitants l'utilisent comme principal moyen de transport. Son caractère increvable lui permet de résister à toutes sortes de chemins pendant de longues années. Avec quelques fixations à l'arrière, les agriculteurs s'en servent pour traîner leurs marchandises. Il n'est pas rare de croiser une Minsk chargée de trois porcs et quelques cages de poules. La moto est d'ailleurs référencée comme "outil agricole" au Vietnam. En ville, ses utilisateurs se repèrent au nuage de fumée qui embaument les embouteillages. Outre le souci de la pollution, il est moins évident de se faufiler dans les ruelles d'une agglomération au guidon d'une Minsk qu'avec un scooter. "Mais c'est tout de même plus stable, nuance une expatriée présente à Hanoi depuis presque dix ans. Comme la circulation marche ici à la loi du fort, quand on croise un autre deux-roues, on passe toujours en priorité !"
Par Nicolas Barriquand - Le Courrier du Vietnam - 4 Mars 2005
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