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Le tennis professionnel fait sa démonstration au Vietnam en attendant mieux

HANOI - Vu Thi Hien n'est guère du genre à se monter la tête. A 43 ans, cette ex-numéro deux du tennis vietnamien féminin se souvient de ses débuts avec humour: "à mon premier tournoi, je suis devenue la troisième joueuse du pays". C'était en 1983, huit ans après la fin de la guerre du Vietnam.

Le pays était plongé dans la banqueroute et la jeune joueuse de Hanoï s'équipait comme elle pouvait, récupérant des vieilles raquettes auprès d'employés de résidents étrangers, empruntant à des amis pour s'offrir un billet de train et aller jouer dans le sud du pays. Vingt ans plus tard, le Vietnam organise son premier tournoi du circuit professionnel (ATP), après avoir récupéré pour trois ans le tournoi de Shanghaï, doté de 380.000 dollars (315.640 euros). Pour Amit Naor, le directeur de la compétition, rien ne s'oppose à ce que la ville conserve le tournoi pour longtemps. "En 1989, quand on est arrivé en Russie, il n'y avait rien. Regardez où ils en sont aujourd'hui ! Si les gens aiment le tennis, s'ils le soutiennent, si c'est un sport national, le Vietnam peut devenir le candidat le plus sérieux en Asie", ajoute-t-il. En attendant, le tennis national végète.

Difficulté financière

Au Vietnam, pays de 82 millions d'habitants dont 80 % vivent en milieu rural, il n'est encore qu'un passe-temps réservé à l'élite urbaine et concurrencé par le badminton, le tennis de table ou la natation. Selon la fédération vietnamienne, il y aurait environ 15.000 joueurs dans le pays. Mais pas de politique pour le haut-niveau. "Les autorités sportives du Vietnam n'investissent pas assez dans ce sport", regrette Do Minh Quan, n° 1 vietnamien, classé au 1411ème rang à l'ATP, le seul local en lice lundi au premier Open du Vietnam.

"Les autorités sportives doivent investir davantage pour les jeunes, les envoyer suivre des formations professionnelles à l'étranger avant d'intégrer les clubs du pays", ajoute-t-il. Dans un pays où le football est une véritable religion, les chances de voir le tennis émerger est faible. "Je ne suis pas optimiste". Doan Quoc Cuong, secrétaire général de la Fédération et président de la Ligue des joueurs, admet que les difficultés sont colossales. "Notre plus grande difficulté est financière", explique-t-il. "Les familles de joueurs doivent dépenser leur propre argent et les subventions de l'Etat restent faibles".

Structure, stratégie et moyens

Les places pour l'Open du Vietnam se vendent 30 dollars (24,9 EUR) pour la journée, 150 dollars (124,6 EUR) pour la semaine. Une belle somme dans un pays où le salaire ouvrier moyen se situe autour des 50 dollars par mois (41,5 EUR). "C'est assez cher pour les gens ordinaires, mais pas trop pour les joueurs de tennis et leurs fans", assure Cuong.

Pour que le tennis se développe, les autorités doivent mettre en place des structures, une stratégie, des moyens. Sans doute le pays a-t-il aussi besoin d'une ou deux locomotives avec des bons résultats, à l'image de ce que réalise dans son pays le Thaïlandais Paradorn Srichapan. Mais "il y a encore peu de joueurs dans le pays et les bons sont toujours les mêmes depuis des années", remarque Huynh Mai Huynh, une Américaine d'origine vietnamienne revenue s'installer dans l'ex-Saïgon.

L'avenir, selon elle, pourrait passer par des joueurs de son profil, des Vietnamiens résidant actuellement à l'étranger, en particulier "aux Etats-Unis ou en Russie". Hien, la quadragénaire, distille aujourd'hui son enthousiasme intact dans la capitale en enseignant aux fils de diplomates et aux Vietnamiens fortunés. En désaccord avec les autorités, elle a abandonné ses fonctions officielles et gagne bien plus en entraînant que jadis en jouant. Elle est ravie que le Vietnam organise un tournoi mais reste circonspecte. "Que pouvons-nous faire ? On a besoin de 50 ans de plus", dit-elle en souriant. "Nous devons tout changer".

Agence France Presse - 28 Septembre 2005