~ Le Viêt Nam, aujourd'hui. ~
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Impressions des étrangers sur le Têt vietnamien

HANOI - William Denjoy, un Français qui a vécu sept fêtes du Têt en huit ans au Vietnam, exprime ses impressions sur le Nouvel An lunaire. "La surprise de la première fois est passée, maintenant, chaque nouvelle année lunaire me remplit de joie et d'émotions fortes", dit-il.

"Je suis arrivé la première fois au Vietnam en 1996 quelques jours avant le Nouvel An lunaire, que j'ai passé cette année à Nha Trang, dans une atmosphère chaleureuse qui a tout de suite contribué à me faire aimer ce pays", a raconté M.William Denjoy. Ce qui m’a notamment agréablement surpris, a-t-il poursuivi, ce sont les efforts et la gentillesse dont faisaient preuve les gens que je rencontrais dans le train ou sur la plage, pour prendre le temps de m’expliquer leurs coutumes et de fêter le Nouvel An avec moi, alors qu’il s’agissait de personnes que j’avais rencontrées au hasard de mon voyage.

En huit ans au Vietnam, a-t-il dit, j’y ai passé sept fêtes du Têt. Je garde en mémoire certaines images de cette période, comme ces familles passant à moto avec un petit poisson vivant dans un sac plastic rempli d’eau, en route pour aller le relâcher dans un lac ou un étang, en offrande au Génie du foyer, ou encore, toujours à moto, le ballet des Vietnamiens transportant, qui un cây quât (kumquat), sur leur porte-bagages, qui une canh dao, branche de pêcher, aux fleurs roses, ou encore un cây mai, abricotier, aux fleurs jaunes ou blanches.

Bien sûr, le Têt c’est aussi le feu d’artifices sur le lac Hoan Kiem (Lac de l'Epée restituée), au milieu de milliers de gens venus en famille. Ce qui est également frappant, c’est le contraste entre la foule que l’on croise dans les magasins les jours précédant le Têt, et les rues désertes du lendemain du Têt, avec tous ces magasins fermés, alors qu’on a l’habitude de les voir ouverts toute l’année. Cependant, j’ai eu l’impression ces dernières années que les commerces rouvraient de plus en plus tôt, alors que je me rappelle encore avoir fait un stock de boîtes de conserves en 1999, quand j’étais encore étudiant, parce que la vendeuse de My Xao près de chez moi m’avait prévenue qu’elle fermerait la boutique durant quelques jours au Têt.

Enfin le Têt, c’est surtout l’occasion de rendre visite aux amis, à la famille, ou aux professeurs quand on est étudiant, et de goûter toutes sortes de gourmandises, de graines de fruits, hat bi, hat dua, de fruits, secs ou frais, dont je raffole. La seule chose que je redoute à cette période, c’est le banh trung, auquel je n’ai jamais pu m’habituer, et qu’il m’est parfois bien difficile de refuser.

Quant à M. Serge Cao dont le père est Vietnamien et la mère française, il a aussi donné ses très fortes impressions sur le Têt vietnamien. Il a raconté ses meilleurs souvenirs sur le Vietnam.

"Je suis né en France et je suis arrivé au Vietnam quand j'avais neuf mois. J'ai passé les dix premières années de mon enfance au Vietnam et j'ai des souvenirs très forts de mon enfance dans le pays. J'étais un Vietnamien, plus qu'un Français puisque j'ai mangé vietnamien, j'ai des souvenirs de ma mère et de mon père qui m'ont rapporté. Je suis arrivé en 1956 au Vietnam car mon père médecin, vietnamien, patriote, a décidé de revenir à l'appel de Ho Chi Minh pour édifier la République démocratique du Vietnam. Dans ses bagages, sa femme, ma mère qui était dentiste, et deux enfants, ma grande soeur et moi même. Moi je suis au Vietnam depuis 48 ans, mais j'ai quitté le Vietnam en 1965, mes parents sont restés car c'était l'époque du "So Tan" (évacuation)...

Vivant à Hanoi, étant allé à l'école maternelle primaire dans la ville, nous avons été évacués à la campagne. J'ai vu les premiers bombardement américains, puis comme nous avions de la famille en France, mes parents nous ont envoyés à l'abri là-bas. Je suis revenu au Vietnam, plusieurs fois après la libération, quand mon père est revenu au Sud Vietnam le 1er mai 1975. J'ai donc découvert mes grands parents paternels en 1981 et 1989. Je suis revenu pour le travail à plein temps en 1990. Je suis un métisse franco-vietnamien. J'ai des souvenirs d'enfance au Vietnam, très forts, et aussi ceux plus récents, de mon premier jour en tant qu'adulte, enseignant, professionnel, français travaillant dans la coopération française puis francophone au Vietnam.

J'ai passé neuf Têts au Vietnam, quand j'étais petit, dans les années 60. Je me rappelle du premier mandarinier que mon père avait acheté pour le balcon, les 5-6 fruits que l'on cueillait sur le balcon, puis mettait dans un bocal avec du sucre, pour en faire des fruits confis, que nous mangions après. Autre souvenir fort, l'époque des pétards, pour les enfants. On faisait encore éclater des pétards dans les années 60, pour les enfants, c'était le grand jeu de Têt familial. Les familles se retrouvaient. Comme mon père était du Sud, toute sa famille était restée à Saigon, devenue Ho Chi Minh-Ville. Mon père et ma mère n'avaient personne de leur famille sur Hanoi, donc c'était vraiment la famille père-mère et les enfants.

Mon impression sur les coutumes, les activités, les plats dans la fête du Nouvel An... ça fait partie de ma culture en grande partie, avec un regard décalé, c'est-à-dire que je regarde cela comme vietnamien et en même temps comme français. Par exemple les coutumes, cela a beaucoup bougé. J'ai vu l'évolution dans le temps, avec l'ouverture, pour parler des derniers Têts...

Il y a dix ans, les têts ça restait très traditionnel, le premier jour c'est la famille, le deuxième jour les amis, le troisième jour le grand cercle. Les trois premiers jours étaient importants, le réveillon était important. C'était d'abord la réunion familiale, toutes les familles se réunissaient. C'est ça qui me marque les plus. D'abord la fête centrée autour de la famille, des liens familiaux. Les plats vietnamiens, personnellement, je ne peux qu'aimer ça. J'ai été élevé là-dedans, j'aime le nuoc mam, j'aime le banh chung (gâteau du riz gluant), j'aime le banh tet. J'aime tous les plats vietnamiens. Concernant les plats du Têt, comme impression aussi forte, c'est l'évolution de la société aussi, du Vietnam rentrant dans un monde plus internationalisé. Au niveau du banh chung, le gâteau du Têt important, avant qu'on ne le trouvait qu'au moment du Têt, mais maintenant on le trouve toute l'année. Cela se banalise, et ça perd sa spécificité de chose rare.

Je me rappelle un Têt passé dans le Sud, à la campagne, c'était très intéressant de voir ce regroupement familial pour préparer le Banh Chung. Maintenant, en ville, ça ne se fait plus, car il y a une accélération du rythme de vie. On peut aller acheter partout, la saveur se perd aussi dans l'industrialisation et la commercialisation du Têt. On sert surtout du foie gras pour la fin de l'année en France... On peut faire la parrallèle avec le Banh Chung : le foie, il ya 15 ans, était un plat rare et cher, maintenant ça se banalise. C'est impossible de faire un réveillon en France sans foie gras. Toutes les familles tiennent à avoir un petit plat de foie gras, puis les huitres et la dinde. Il y a aussi la bûche de Noël, ça évolue. On retrouve ce même souci de manger les plats dit traditionnels, mais comme en même temps ces plats se généralisent, on en trouve toute l'année et cela perd de son originalité.

Agence Vietnamienne d'Information - 7 février 2005