~ Le Viêt Nam, aujourd'hui. ~
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Ateliers d'Armançon refuse le cul de sac

L'entreprise semuroise installe une partie de sa production au Vietnam.

Un groupe d'entreprises qui pèse plus de 48 millions d'euros de CA en 2004 (en augmentation de 10 % par rapport à 2003). Le tout sans faire de bruit. Voila pour la carte de visite du groupe Maroquinerie Thomas (992 personnes), dont le fleuron, Ateliers d'Armançon, est à Semur-en-Auxois. Activité de cette société, établie aussi à Saulieu, Troyes, Aubervilliers ou bien encore dans la Marne : la sous-traitance de produits de maroquinerie pour l'industrie du luxe. Et dans cet exercice où l'un de leurs clients prestigieux n'est autre que Vuitton, Thierry Thomas et son groupe sont devenus les premiers d'Europe. 1937 : le grand-père à Paris ; 1971 : la rencontre avec Vuitton et l'ouverture décentralisée d'un petit site de production à Semur-en-Auxois avec dix salariés ; 1976 : Thierry Thomas, derrière Christian, son père, prend les rênes après ses études de Sup de Co Lyon. Une à une, « monsieur Thierry » comme l'aiment à le surnommer ses anciens salariés, égraine les grandes dates qui ont jalonné sa vie de chef d'entreprise. Et dans le calendrier interne de ce passionné touche-à-tout de 52 ans, nul doute que 2005 aura une bonne place.

« On a franchi le pas. Nous partons ouvrir une usine au Vietnam. Nous nous développons en France mais aussi en Asie pour élargir notre offre. Nous commençons par dix salariés dans un entrepôt loué à un ami. A côté, nous construisons, sur 3 000 m2, notre future usine capable de faire travailler 200 personnes. Tout ceci nous coûte 1,7 million de dollars, équipements venus de France compris, alors qu'en France, pour juste un bâtiment, on taperait dans les deux millions d'euros » présente Thierry Thomas. Car nous y voilà. Le patron a décidé de retrousser ses manches et de moins subir le poids du coût du travail en France.

L'argent. Et le temps

« Au Vietnam, la minute de travail coûte 3 centimes d'euros. En France, dans les mêmes conditions, comptez 39 centimes. ». Dans ces projets, Thierry Thomas qui est également élu d'opposition à la ville de Semur, entend jouer sur les « made in ». Comprenez : « Nos grandes marques ne veulent que du made in France. Pas question de faire quoi que ce soit pour elles en dehors de nos frontières. Mais d'autres clients, qui ont des besoins réels, sont moins regardants. A nous de les satisfaire. Sinon, d'autres l'auraient fait à notre place » explique le pragmatique patron.

Et pour prouver « au monde » qu'il ne délocalise pas, mais se développe, Thierry Thomas ajoute : « Ateliers d'Armançon à Semur, c'est aujourd'hui 418 personnes dont 83 % de femmes. Nous embauchons trente salariés supplémentaires et nous allons construire sur ce même site un nouveau bâtiment pour agrandir le site de coupe des peaux ».

Un pari.

Avec ce nouveau pari sur l'Asie, la famille Thomas prolonge ainsi l'aventure. « Maintenant, il va falloir stabiliser tout ça. Pour le grand départ vers Hô Chi Minh Ville, je m'entoure de mes anciens. Ceux qui sont avec moi depuis des années. Même les machines viennent de France. Pas question d'en faire l'économie. C'est un pari déjà risqué. Ce n'est pas la peine d'en rajouter » commente encore ce sportif, aujourd'hui président du club de hand local. De son arrivée à Semur dans les anciens abattoirs dans la vieille ville, en passant par son essor et son développement de ce jour, Thierry Thomas trouve toujours l'énergie pour maintenir le pied sur le champignon. « Bien sûr que j'aurais pu vendre. J'avais même dit que j'arrêterai de travailler à 45 ans » reprend ce marin « frustré » en Auxois, en montrant, proche de son bureau, la maquette de son bateau qui l'attend sagement amarré à Noirmoutier. « Mais c'est ainsi. Et j'ai mes enfants avec moi. Je ne peux pas les laisser comme ça. »

Par Jean-Philippe Guillot - Le Bien Public - 10 Mai 2005