"Les trois saisons", un pont entre l'Amérique et le Vietnam
PARIS - Avec "Les trois saisons" (Three seasons), un film impressionniste sur les destins
parallèles de quelques Saigonnais, le jeune Californien Tony Bui fait un pont entre les Etats-Unis et le
Vietnam, où il est né en 1972, et qu'il représente dans la course à l'Oscar du meilleur film étranger.
Parrainé par Harvey Keitel, son acteur et producteur exécutif, "Les trois saisons" est un film vietnamien et en
vietnamien, couronné en 1999 du grand prix et du prix du public au festival américain de Sundance, et, en
même temps, le premier film américain tourné au Vietnam depuis la guerre.
Dans la galerie de portraits que brosse Tony Bui, il y a James, un ancien GI américain (Keitel) qui recherche la fille qu'il a eue
avec une Vietnamienne, Hai (Dong Duong), le conducteur de rickshaw, qui s'éprend de Lan (Zoe Bui), une jolie prostituée en
quête d'un riche mari, Kien An, une adolescente qui cueille des lotus blanc pour le compte d'un poète lépreux et Woody, un
enfant des rues qui survit en vendant du chewing gum et des cigarettes.
Tony Bui, qui a quitté le Vietnam à 2 ans, et y est revenu pour la première fois à 19 ans, filme des personnages à la recherche
de l'amour et aux prises avec la dureté de la vie. Tout en montrant les quartiers misérables de Saigon où habite Lan et les
palaces où elle va se vendre, le jeune réalisateur peint aussi la beauté sereine du lac recouvert de lotus blanc.
Lotus en plastique
C'est là que Kien An, à bord d'une petite barque, cueille les boutons parfumés, que concurrencent les lotus de plastique. Son
chant attire l'attention du poète, qui vit reclus dans un temple pour cacher sa maladie et ses difformités. Il a perdu ses doigts et
Kien An va tenir la plume pour lui.
Ces histoires parallèles ne font pas un véritable scénario et "Les trois saisons" se sont vu reprocher trop de joliesse et
d'optimisme mais cette première production américaine réalisée au Vietnam est une promesse.
Se défendant d'avoir fait un film avec "un happy end", Tony Bui déclarait, lors de la conférence de presse, que ses personnages
"gardent une lumière dans leur vie, ils cherchent à l'améliorer. C'est donc un film d'espoir".
Pour Harvey Keitel, "Les trois saisons" est un pont entre le passé, le présent et l'avenir qui permettra aux Américains de mieux
comprendre l'histoire du Vietnam." L'acteur remarqué dans "La leçon de piano", "The Bad Lieutenant" d'Abel Ferrara ou chez
Quentin Tarantino, se sent la "responsabilité d'aider les jeunes réalisateurs qui ont des histoires personnelles à raconter."
Tony Bui, un "Viet Kieu" (un membre de la diaspora) grandi dans la Silicon Valley, a rencontré plus de difficultés avec les lotus
qu'avec la bureaucratie vietnamienne, malgré la présence d'un censeur chargé de valider toutes les scènes. Faute de trouver un
lac recouvert de fleurs, l'équipe a planté 10.000 lotus mais ils étaient rouges. Il a fallu remplacer une à une les fleurs par des
boutons et des fleurs en plastique blancs.
Par Marie Thérèse Delboulbes - AFP - le 09 Janvier 2000.
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