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Vietnam, 1967, l'Amérique dérape

Torture et assassinats: le «Toledo Blade» raconte comment la «Tiger Force» s'est rendue coupable de crimes de guerre contre la population vietnamienne.

C'est un scoop qu'a publié hier l'édition dominicale du «Toledo Blade», le quotidien local de Toledo, petite ville sans histoire du nord de l'Etat de l'Ohio (Etats-Unis). Au terme d'une enquête très fouillée, le journal raconte comment une unité d'élite de l'armée américaine, surnommée la Force du Tigre, a commis en 1967, au Vietnam, des crimes de guerre jusque-là occultés. Des massacres et des actes de torture abominables, sur des centaines de civils, dont le commandement était informé, affirme le «Toledo Blade», et qu'il aurait même dans certains cas encouragés. Se fondant à la fois sur des témoignages d'anciens de la «Tiger force», sur ceux de dizaines de civils vietnamiens ayant survécu, et sur un document clé de 22 pages encore classé «secret défense» par le Pentagone, le journal retrace avec minutie les exactions de ces tigres sanguinaires.

«Nous allions dans les villages et nous tirions sur tout le monde», raconte Harold Fischer, un ancien médecin militaire intégré dans l'unité. «Nous n'avions pas besoin d'excuses. Si (les Vietnamiens) étaient là, ils étaient morts. Ça m'a rendu malade», raconte ce témoin. D'autres, comme le soldat William Doyle, n'ont pas les mêmes remords: «La seule chose que je regrette est de ne pas en avoir tué davantage.» Des femmes et des enfants ont été enterrés vivants, affirme le «Toledo Blade».

Ce dossier avait déjà été ouvert une première fois en 1971, alors que la guerre du Vietnam n'était pas finie. Trente éléments de l'unité, rappelle le quotidien, s'étaient retrouvés dans le collimateur de l'armée qui, au terme de quatre ans et demi de recherches, avait reconnu que 18 d'entre eux «pouvaient» avoir commis des crimes de guerre. Mais ces soldats n'ont jamais été inculpés, indique le «Toledo Blade». Malgré ces révélations, le département américain de la Défense a indiqué dès dimanche soir qu'il n'était pas question de reprendre l'enquête. «Il n'y a pas de preuves nouvelles ou probantes qui permettent la réouverture du dossier», a indiqué Joe Burlas, un porte-parole du ministère de la Défense. «La seule manière de poursuivre les soldats éventuellement coupables consiste à les faire passer en cour martiale, mais il aurait fallu pour cela qu'ils soient encore en activité», explique le porte-parole. Or aucun des membres de la force du Tigre de 1967 ne fait encore partie de l'armée.

Libération - 20 Octobre 2003.