Tran Anh Hung a achevé le tournage d'un nouveau film au Vietnam
HANOI - Quatre ans après "Cyclo", le cineaste
franco-vietnamien Tran Anh Hung vient d'achever au Vietnam le tournage d'un
nouveau long métrage, "A la verticale de l'été", son premier film tourné
principalement à Hanoï.
Pour obtenir l'autorisation de réaliser un film dans la capitale
communiste, Hung a du utiliser tous ses talents de persuasion.
La sortie de "Cyclo", qui avait obtenu le Lion d'or au festival
cinématographique de Venise en 1995, avait provoqué un tollé de critiques
officielles et le film n'a jamais été projeté au Vietnam.
Les autorités avaient alors reproché au film, qui racontait la vie d'un
conducteur de cyclo-pousse d'Ho Chi Minh-ville (ex-Saigon) versant dans la
délinquance après le vol de son outil de travail, de donner une image
négative du Vietnam.
"Il y avait une incompréhension entre mon cinéma et les gens d'ici. Ils
pensaient que la violence donnait une mauvaise image du pays, il a été
difficile d'obtenir l'autorisation de tourner à nouveau", a indiqué Hung à
l'AFP.
Neuf mois de négociations ont été nécessaires à Hung pour convaincre les
commissaires culturels de Hanoï que ses films ne "contiennent ni discours
politique ni considérations sur la moralité".
Il a finalement obtenu l'autorisation de tourner fin mai dernier, mais,
pendant les 62 jours de tournage, un censeur du ministère de la Culture
était présent sur le plateau pour s'assurer que le film ne s'écartait pas
du scénario original.
"Ici, il est impossible de travailler sans censeur, et je veux continuer à
faire des choses au Vietnam", ajoute Hung.
Grace à ce compromis le metteur en scène a réussi où beaucoup d'autres ont
échoué. Ainsi en 1997 les producteurs de Hollywood avaient du renoncer à
tourner un James Bond au Vietnam à la suite d'un véto du gouvernement du au
fait que les précédentes aventures de l'agent 007 l'opposaient à des
adversaires communistes.
Hung précise que son nouveau film, au budget modeste de 4,8 millions de
dollars, est une histoire simple "sur les relations entre hommes et femmes,
qui porte principalement sur les notions de bonheur, de fidélité et
d'infidélité".
Il raconte un mois d'été dans une famille hanoienne contemporaine de la
classe moyenne composée de trois soeurs et de leur frère, selon le
cinéaste.
"Je ne suis pas un cinéaste amateur de grands événements, mais tout le film
devrait décrire une sensation diffuse de fragilité", ajoute Hung.
"C'est une sensation dont on a toujours conscience sans la posséder et que
j'ai toujours souhaité reproduire en venant à Hanoï, une qualité d'intimité
que l'on retrouve partout ici", estime le cinéaste.
Mais si Hung adore la nonchalance de la capitale vietnamienne où la vie se
passe en grande partie dans la rue, il dit que "A la verticale de l'été"
est aussi influencé par les oeuvres des peintres Rothko et Rauschenberg et
par le cinéma japonais d'Akiro Kurusawa et de Yasujiro Ozu.
A cet égard, son nouveau film devrait rappeler la texture riche et la
nostalgie de son premier film, "L'odeur de la papaye verte".
Les acteurs de "A la verticale de l'été" sont en majorité des Vietnamiens,
dont deux actrices célèbres au Vietnam, Nhu Quynh et Le Khanh. L'épouse du
metteur en scène, Tran Nu Yen Khe, y joue le rôle de la plus jeune des
trois soeurs et Hung y fait lui même une courte et comique apparition dans
le rôle d'un cinéaste vietnamien d'outre-mer.
Hung souhaite revenir à Hanoï lorsque la post-production du film sera
achevée: "J'espére pouvoir y montrer ce film", conclut le metteur en scène.
AFP, le 22 Août 1999.
|