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Les singes de la péninsule indochinoise risquent de disparaître avant la fin de ce siècle

DEY AMBIL - A quelques pas d'un panneau rappelant que le trafic d'animaux est interdit, un vendeur propose quatre loris paresseux, des petits primates aux yeux brillants, destinés à être brûlés vifs et réduits en remèdes de médecine chinoise. Le commerçant, Sem Sovan, explique qu'on peut acheter un gibbon pour 200 dollars américains (1.500FF/230 euros), tandis que des clients attendent dans son échoppe délabrée où grouillent serpents, mainates et autres ''produits'' illicites provenant du Parc national Kirirom, tout proche.

Autrefois, le Cambodge, le Vietnam et le Laos étaient un véritable paradis pour les primates, désormais victimes de braconniers, de marchands de médicaments traditionnels et de villageois qui empiètent sur leurs territoires. Alors qu'aucune espèce de primates n'a disparu au cours du siècle dernier, ces derniers sont maintenant menacés d'extinction mondiale. Et leur disparition a toutes les chances de commencer en Indochine, estime Frank Momberg, de Faune et Flore Internationales (FFI). Sur les 25 espèces de singes menacées répertoriées par l'organisation américaine Conservation International, quatre vivent au Vietnam. Il ne reste que 100 spécimens du langur d'or de l'île de Cat Ba et moins de 200 rhinopithèques du Tonkin, souligne M. Momberg. Les langurs de Delacour et les doucs gris sont presque aussi vulnérables.

Quant au gibbon noir de Hainan, peut-être le primate le plus menacé du monde, ''il n'y a qu'une chance très mince qu'il voie la fin de ce siècle'', redoute M. Momberg. Moins de 50 individus subsistent, au Vietnam et sur l'île chinoise de Hainan. Avec ce patrimoine génétique réduit, d'importants efforts sont nécessaires si l'on veut conserver l'espèce: reproduction en captivité et lutte contre le déboisement pour protéger son habitat naturel. Dans le sud-ouest du Cambodge, les gibbons à casque ont longtemps trouvé un refuge sûr dans la chaîne des Cardamomes, rendue difficile d'accès par la guerre et le paludisme. Mais à présent, ils ne sont plus à l'abri des braconniers. M. Momberg pense avoir peut-être trouvé une solution. ''Une réserve ne suffit pas. Nous avons besoin de la coopération des habitants'', explique-t-il. ''Si la communauté ne veut pas s'en occuper, c'est la fin''.

Dans une forêt montagneuse du nord du Vietnam, FFI tente de préserver le gibbon noir en impliquant une demi-douzaine de villages voisins. M. Momberg souhaite que les villageois établissent les frontières de la réserve et en choisissent les gardes. ''Ces gens ignoraient qu'ils hébergent un singe unique au monde, alors qu'ils peuvent en tirer une certaine fierté''. L'un des principaux dangers qui guettent les singes de la péninsule indochinoise vient de sa proximité avec la Chine, friande de viande exotique, de médicaments et d'aphrodisiaques. Et l'appétit pour ses produits augmente aussi vite que la prospérité économique de ce pays.

Par Denis D. Gray - The Associated Press, le 22 Juin 2001.