Robusta: les excès vietnamiens
Apocalypse now, tel est le titre du dernier
bulletin publié par le négociant en café Bouvery
International. Cette reprise du titre du film de
Francis Ford Coppola, consacré à la guerre
américaine au Vietnam, s’explique à la fois par
le niveau apocalyptique des prix du café et par
le rôle joué par le Vietnam dans cet
effondrement.
Si les prix du robusta sont aussi
bas sur les marchés mondiaux, c’est en effet que sous
l’impulsion des dirigeants de Hanoï soutenus par la communauté
financière internationale, le Vietnam a réussi un exploit: celui de
faire progresser de 8000% sa production de café. Il n’a fallu pour
cela que vingt ans. En 1980, le Vietnam produisait 10 000 tonnes
de café. Autant dire rien. Aujourd’hui, les experts situent la
récolte en cours entre 750 000 et 800 000 tonnes. C’est le tiers
de la récolte mondiale. Mais cette montée en puissance permise
par l’utilisation de méthodes agricoles modernes, irrigation,
engrais est allée trop loin. Pour beaucoup d’acteurs de cette
filière, les Vietnamiens par leur succès même sont les principaux
responsables du déséquilibre du marché international et de la
chute des cours mondiaux. L’offre est structurellement supérieure
à la demande. Les professionnels des matières premières sont
certes habitués aux cycles qui rythment l’évolution des marchés.
Plusieurs années de hausse succèdent à plusieurs années de
baisse, le temps d’ajuster production et demande. C’est une
règle immuable. Mais de l’avis de beaucoup de monde, le
balancier cette fois-ci est allé trop loin. Si loin qu’il ne semble pas
prêt de revenir. «Rien de bon à attendre avant un an» affirme un
spécialiste. Le marché du robusta, c’est donc Apocalypse now et
même apocalypse pour un bon bout de temps.
Par Jean Pierre Boris - Radio France Internationale, le 10 Janvier 2001.
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