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Faire les courses aux Puces de la capitale

À Hanoi, il existe beaucoup de marchés mais celui qui remporterait la palme de la singularité, c'est sûrement le marché aux puces. C'est le lieu idéal pour aller fouiner à la recherche de bonnes affaires.

Les Hanoiens appellent le marché aux puces le Cho gioi, traduit litéralement "marché à ciel ouvert". Dimanche dernier, je m'y suis rendu avec mon ami qui voulait vendre une motopompe dont le moteur avait rendu l'âme depuis bien longtemps. Pas la peine d'arpenter le marché en tous sens. Rapidement, un marchand âgé d'une cinquantaine d'années s'est approché, l'œil brillant. Il n'a jeté qu'un seul coup d'œil sur la machine puis, sans regarder mon ami, il a lancé ces quelques mots : "Machine chinoise....vieux modèle....Hmmmmm.....80.000 dôngs".

Mon ami avait acheté cette motopompe 700.000 dôngs, soit dix fois plus. Autant dire que le prix annoncé lui est resté en travers de la gorge ! Mais pas la peine de discuter, il a bien fallu accepter l'offre. Dans sa petite échoppe bâchée, une dizaine de motopompes étaient posées par terre. Le marchand nous a donné quelques ficelles sur ce fascinant marché : "Ici, on peut vendre n'importe quoi. En cherchant bien, vous pouvez trouver tout ce dont vous avez besoin. Nous achetons ce que vous ne voulez plus utiliser et, en revanche, nous les revendons à tous ceux qui en ont besoin, voilà la loi du marché aux puces !", a-t-il expliqué avec un coup d'œil malicieux qui en disait long sur son expérience de vieux renard. "Chaque jour, ma vie serait beaucoup plus décente si je pouvais acheter quelques machines comme la vôtre, à un prix pareil !", s'est-il exclamé. Une remarque qui a fait se raidir encore plus mon pauvre ami....

Dans un autre coin du marché, sur la rue Chùa Vua, un jeune était en train de discuter du prix de sa vieille bicyclette dont il comptait se séparer. Un modèle chinois, qu'il avait dû acheter neuf 700.000 dôngs mais qu'il ne revendrait ici que 90.000 dôngs. Les commerçants du marché aux puces sont plutôt durs en affaires... Quelques minutes après la transaction, le deux-roues a été emporté à l'autre bout de la rue pour subir une révision complète. En quelques coups de clés à mollette, il a été désossé et tout ce qui était en piteux état a été prestement remplacé. Le cadre a été passé au papier de verre puis repeint. Dans l'après-midi, le vélo était méconnaissable. Et le marchand ne le laisserait pas partir pour moins de 200.000 dôngs. Dans cette rue des vélos d'occasion, des centaines de deux-roues attendent les acheteurs potentiels. La plupart ont été soumis à des réparations, succinctes parfois générales. Beaucoup de ces vélos ont été vendus par des voleurs pour qui ce marché constitue un bon moyen d'écouler leurs larcins.

Le marché aux puces est une véritable "Caverne d'Ali Baba", où tout s'achète et se vend, ou presque. La plupart des visiteurs sont éblouis par la variété des marchandises exposées, du boulon jusqu'aux pièces automobiles, en passant par les téléviseurs, les sèches-cheveux, les téléphones, les radios,... Et il n'est pas difficile de se procurer des CD-Rom, des VCD, des CD, ainsi que des cassettes classées X, vendues sous le manteau comme il se doit...

Chaque rue a sa spécialité

Personne ne sait exactement à quelle date est apparu le Cho gioi. Mais certaines personnes âgées, qui vivent depuis longtemps dans les parages, affirment qu'il existe depuis près d'un siècle. À cette époque, il y avait très peu de monde à venir vendre ici. Il n'y avait d'ailleurs aucun abri ni échoppe fixe pour accueillir les vendeurs. Quant aux acheteurs, ils étaient pour la plupart des gens aux revenus modestes. Toujours selon les anciens du quartier, ce marché s'est implanté sur ce qui était autrefois le village de Thinh Yên (actuellement c'est l'arrondissement Hai Bà Trung). Maintenant on serait bien en peine de trouver les traces du passé, sauf la pagode Vua (Roi) qui se situe à l'extrémité de la rue Thinh Yên.

Au fil des décennies, le nombre de vendeurs s'est multiplié... et la clientèle s'est élargie à toutes les couches sociales. Le marché est un lieu effervescent, animé de l'aube jusqu'au coucher du soleil. Il a grossi au fil des années, les commerçants propageant leurs activités dans d'autres rues alentours. Maintenant, les Puces comptent plus de 400 stands et échoppes. Chaque rue a sa spécialité : la rue Thinh Yên ravira les amateurs d'objets électroniques, de disques ou de CD-Rom. La rue Doàn Trân Nghiêp comblera ceux qui recherchent des accessoires automobiles. Si vous rechercher de quoi réparer votre moto, allez renifler les bonnes affaires dans la rue Trân Cao Vân. Et si vous souhaitez vous offrir un vélo bon marché, jetez un coup d'oeil dans la rue Chùa Vua.

Laissez-vous tenter et aller déambuler dans ce marché peu connu, très rarement mentionné dans les guides et brochures touristiques. Autant vous dire que les Tây (occidentaux) ne sont pas légion ici, c'est pourquoi vous risquez de piquer la curiosité de pas mal de monde ! Même si vous n'avez rien à acheter, allez respirer l'ambiance de ce lieu unique. Certes, l'atmosphère est moins odorante et colorée que dans les marchés classiques. Mais le Cho gioi est unique à Hanoi, c'est pourquoi il vaut le détour.

Les Puces de Hanoi se trouvent à environ 3 km au sud du Lac Hoan Kiêm. Au début de la rue Hué, qui part à angle droit de la rue Dai Co Viêt, tournez immédiatement à droite. Le Cho gioi est face à vous...

Par Nguyen Anh Tu - Le Courrier du Vietnam - 12 Septembre 2003.