Le Vietnam reste le royaume du piratage des oeuvres artistiques
Le Vietnam est devenu le mois dernier un membre de la Convention de Berne sur la protection des droits des oeuvres littéraires, mais le pays peine à respecter ses engagements internationaux, encore très marqué par une idéologie socialiste qui veut que la culture appartienne au peuple.De Hanoï à Ho Chi Minh-Ville (sud), on trouve le dernier album de David Bowie, l'intégrale de la série américaine "Friends" ou la traduction en plusieurs langues du chef-d'oeuvre de Saint-Exupéry "Le Petit Prince". Le 26 octobre, Hanoï est devenu le 156e pays signataire de la Convention pour la protection des oeuvres artistiques et littéraires. Mais la réalité est loin des textes.
"Nous suivons l'idéologie socialiste selon laquelle les oeuvres culturelles, artistiques et scientifiques sont la propriété du peuple", relève Tran Thi Truong, directrice adjointe du Centre du Vietnam pour les droits littéraires."Bien que ne disposant d'aucun droit, nous sommes fiers d'avoir apporté la quintessence de l'art au peuple vietnamien en publiant les traductions d'auteurs connus dans le monde entier", renchérit Nguyen Phan Hach, directeur de la Société d'édition de l'association des écrivains.
La prise de conscience du fait que le pays doit s'attaquer aux reproductions en chaîne des contrefaçons culturelles est toute récente et s'est un peu accrue avec la candidature du pays à I'Organisation mondiale du commerce (OMC). Selon le Convention de Berne, le Vietnam doit protéger les auteurs des 155 autres pays membres et bénéficie en retour de protection dans ces marchés. Mais la route sera longue. Au Vietnam, le texte de la convention est ainsi introuvable ou presque.
"Au prix de beaucoup d'efforts, je viens de recevoir une copie grâce à des contacts personnels. Mais j'ai vraiment besoin d'explications", se plaint Doan Tu Huyen, directeur du Centre Dong Tay de linguistique. "Les éditeurs vietnamiens ne savent pas où ils en sont". Depuis 1999, le Vietnam publie entre 500 et 700 livres étrangers par an y compris des rééditions. Un chiffre qui va certainement chuter dans les années à venir, tant il est coûteux et compliqué de trouver un auteur et lui acheter ses droits.
Mais les juristes affirment que, Convention ou pas, les copies ont encore un bel avenir devant elles. "Le gouvernement doit mettre en place un cadre légal plus précis tout en faisant un travail de sensibilisation auprès du public", estime Khuat Thu Quyen, du cabinet Pham et Associés. La mise en application des règlements internationaux sera complexe. "Mais on ne veut pas rester à la traîne", affirme le juriste.
En attendant, le consommateur vietnamien y trouve son compte. "Troie", le dernier péplum avec Brad Pitt en tête d'affiche, s'achète en DVD en versions anglaise et chinoise pour à peine un peu plus d'un euro.
Agence France Presse - 12 Novembre 2004
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