~ Le Viêt Nam, aujourd'hui. ~
Le portail de l'actualité vietnamienne

[Année 1997]
[Année 1998]
[Année 1999]
[Année 2000]
[Année 2001]

L'hippodrome de Phu Tho fait rêver les parieurs de l'ex-Saïgon

HO-CHI-MINH-VILLE - Longtemps interdites par le régime communiste, les courses de chevaux de l'hippodrome de Phu Tho à Ho Chi Minh-Ville (sud) cristallisent les rêves de fortune des parieurs de l'ex-Saïgon.
Des dizaines de milliers de spectateurs-parieurs se ruent chaque week-end à l'hippodrome, seul établissement du genre au Vietnam et seul endroit où des paris sont organisés par l'Etat depuis l'ouverture du pays à la fin des années 80.

"La majorité des spectateurs sont des parieurs professionnels, ils viennent ici pour satisfaire leur passion pour les jeux d'argent et leurs mises dépassant souvent largement les sommes stipulées par l'Etat", affirme Vu Van Ta, l'un des policiers chargés de la sécurité de l'hippodrome de l'ex-Saïgon.
"Certains d'entre eux perdent des milliers de dollars en un seul après-midi et d'autres ont dû vendre leur voiture ou leur maison à cause de leurs mises énormes et frauduleuses", explique M. Ta en doutant du "caractère sportif" de cette "activité de distraction". Le pari maximum est officiellement fixé à 20.000 dongs (1,5 dollar) par spectateur pour une course, et le gagnant ne peut théoriquement que remporter un "grand prix" d'une valeur de 200 dollars. Mais des milliers de parieurs n'hésitent pas à miser sous le manteau pour des sommes dont la valeur totale peut atteindre des dizaines de milliers de dollars.

"Ici, toute le monde parie, adultes, enfants, riches et pauvres, et parfois même des étrangers. Ces activités dépassent les capacités de contrôle de l'Etat", ajoute M. Ta devant les grilles de bambou qui séparent la piste des spectateurs.
"Il existe mille manières pour arranger les résultats des courses: les gros parieurs cherchent à manipuler les propriétaires de chevaux et leurs cavaliers, et parfois même à doper les chevaux pour choisir à l'avance gagnants et perdants", explique Tran Ba Huynh, un parieur "professionnel". Les Français avaient aménagé à la fin du 19e siècle ce champ de 50 hectares du sud de l'ex-Saïgon avant d'y construire en 1932 un hippodrome. Dès la fin de la guerre du Vietnam en avril 1975, l'hippodrome avait été fermé par les autorités communistes qui le considéraient comme une source de délinquance. L'hippodrome a rouvert ses portes en mars 1989 et est géré par le Service municipal des Sports.

L'établissement, dont les bâtiments de style français se sont délabrés, attire chaque jour de courses au moins une dizaine de milliers de spectateurs répartis sur deux tribunes et accueille et une centaine de chevaux.
Il constitue une importante source de recettes pour le budget municipal, pour les centaines de petits vendeurs de boissons ou de nourriture et pour les professionnels de la fourniture de "tuyaux" sur les capacités des chevaux engagés.

"Beaucoup de gens rêvent de s'enrichir rapidement grâce aux courses de chevaux mais ils finissent totalement ruinés", raconte Nguyen Thanh Tan, un jockey assis sur sa monture dont la cote atteint 2.000 dollars. Les jockeys sont généralement âgés de 13 à 15 ans et leur poids est limité à 35 kilos en raison de la petite taille des chevaux vietnamiens. Ils reçoivent une commission de 10% des recettes versées aux propriétaires de chevaux par les organisateurs. Les chevaux, qui participent en général aux 10 courses du week-end, sont élevés par des habitants des provinces voisines d'Ho Chi Minh-Ville, la mégapole économique du sud peuplée de 7 millions d'habitants.

"Les passionnés des jeux d'argent n'abandonnent l'hippodrome qu'après avoir accumulé d'énormes dettes personnelles qui les mènent parfois jusqu'à la prison", commente l'un des organisateurs des courses.

AFP, le 1er Novembre 1999.