Mondial-2002: les parieurs vietnamiens piaffent d'impatience
HANOI - Comme les millions de fans vietnamiens du ballon rond, les
parieurs
clandestins attendent avec impatience le coup d'envoi de la Coupe du
monde
de football, une occasion en or d'assouvir leur passion du jeu.
Plusieurs semaines avant le début du Mondial, de nombreux parieurs
amateurs
avaient déjà commencé à étudier minutieusement la composition des
sélections
nationales et le calendrier des matches de la 17e Coupe du monde de
football, disputée en Corée du sud et au Japon du 31 mai au 30 juin.
"J'ai mis de côté assez d'argent pour parier sur tous les matches et
d'abord
sur le premier, entre le Sénégal et la France le 31 mai, car ce premier
match est souvent le plus excitant", déclare Tran Quang Hai, 38 ans, un
bookmaker ayant pignon dans un café-internet de Hanoï.
"La Coupe serait bien moins intéressante si on ne pariait pas et une
telle
occasion ne se présente que tous les quatre ans", affirme Hai, en
étudiant
attentivement le tableau des équipes et des rencontres.
Un grand nombre de "cafés-football" équipés de téléviseurs à écrans
géants
ont ouvert ces dernières semaines dans les grandes villes en prévision
de la
Coupe du monde, dont les matches seront suivis en direct par des
dizaines de
millions de Vietnamiens.
Familles ruinées
"Les paris clandestins sont souvent organisés de façon sophistiquée à
l'aide
de téléphones portables et dans tous les milieux. C'est vraiment
alarmant",
a souligné à l'AFP le lieutenant Do Thanh Van des forces chargées du
maintien de l'ordre social du district 1 de Ho Chi Minh-Ville, la
capitale
économique du sud.
"La plupart des clients de cafés-football sont des parieurs qui peuvent
miser jusqu'à 25.000 dollars (27.100 euros) par match", somme énorme
dans un
pays où le revenu moyen annuel par habitant n'atteint pas 400 dollars
(435
euros), a estimé M. Van.
"Beaucoup de familles ont été ruinées par les paris, à l'origine depuis
notamment deux ans d'affaires criminelles et de troubles sociaux dans
cette
municipalité", a-t-il expliqué, en déplorant qu'"il y ait eu trop peu
d'arrestations".
Les paris se sont largement répandus ces dernières années au Vietnam où
ils
sont officiellement interdits, à l'exception de paris très limités
organisés
et strictement contrôlés par l'Etat sur des courses de lévriers.
Dans l'ancienne Saïgon, selon le responsable, des centaines de parieurs
jouent sur les matches européens, notamment ceux des Championnats
d'Angleterre, d'Italie, d'Espagne et d'Allemagne. Les paris peuvent
porter
non seulement sur les résultats, mais aussi sur la couleur des
chaussettes
des footballeurs, la nationalité de l'arbitre, et même... la race des
chevaux de David Beckham.
Réseaux internationaux
Selon la police saïgonaise, les réseaux de parieurs vietnamiens ont
établi
des liens avec ceux de Macao, Hong Kong et Taïwan et d'importantes
sommes
ont été transférées discrètement ces derniers temps entre ces réseaux
pour
financer leurs jeux d'argent.
Les autorités vietnamiennes ne sont pas en mesure d'évaluer le montant
des
mises, mais selon la presse officielle, elles atteindraient "plusieurs
dizaines de millions de dollars" lors de la Coupe du monde.
Des opérations de "nettoyage" ont été lancées à cette occasion au
Vietnam,
en particulier à Ho Chi Minh-Ville, mais seule une cinquantaine de
parieurs
illégaux ont été arrêtés la semaine dernière dans la province voisine de
Dong Nai et d'importantes sommes d'argent confisquées par la police.
Lors de l'Euro-2000, 177 parieurs illégaux avaient été interpellés dans
la
seule province de Nam Dinh (nord). Afin de dissuader les parieurs de
profiter de l'Euro-2000, un tribunal de Ho Chi Minh-Ville avait condamné
en
juin 2000 deux parieurs vietnamiens à 9 et 12 mois de prison ferme.
"Il est très difficile pour nous de les prendre en flagrant délit,
surtout
les organisateurs, c'est comme capturer vivant un poisson dans la mer",
confiait un haut officier de police d'un district peuplé de Hanoï.
Par Le Thang Long - Agence France Presse - 24 mai 2002
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