Plus d'argent, moins de Vietnamiens: les promesses des partis en campagne
Augmentation du niveau de vie, lutte contre la
corruption: les partis cambodgiens martelaient
vendredi leurs thèmes favoris au dernier jour de
campagne, mais ce sont les discours aux accents
violemment antivietnamiens qui auront trouvé le
plus d'écho avant les législatives de dimanche.
C'est le parti royaliste du FUNCINPEC qui a le
plus allègrement exploité la fibre nationaliste et
l'antipathie historique, viscérale, du Cambodgien
à l'égard du Vietnamien, en désignant à la
vindicte populaire la communauté vietnamienne
au Cambodge.
"Il y a eu une véritable diabolisation des
Vietnamiens pendant la campagne, des discours
totalement racistes", note un diplomate.
Le prince Norodom Ranariddh, dont le
FUNCINPEC avait fait une très mauvaise
campagne aux communales de 2002 faute de
s'être démarqué de son puissant partenaire de
la coalition gouvernementale, le Parti du peuple
cambodgien (PPC) du Premier ministre Hun Sen,
n'a pas fait dans la demi-mesure.
Attaquer les Vietnamiens lui a permis de s'en
prendre à Hun Sen, installé par Hanoï aux
commandes pendant l'occupation vietnamienne
du Cambodge.
"Si nous ne sommes pas vigilants, un jour nous
nous retrouverons minoritaires dans notre
pays", a lancé le prince, utilisant le mot de
"yuons", terme très péjoratif équivalant à peu
près à "barbares", lors de diatribes très
applaudies.
Les Vietnamiens, dont la communauté est
estimée à environ 100.000 personnes,
clandestins inclus, sont tour à tour accusés de
résidence illégale dans le pays, d'incursions
territoriales, d'empiètements sur les frontières,
de concurrence déloyale en matière de pêche.
Le prince a promis, s'il devenait Premier ministre,
de créer un ministère de l'Immigration pour
"régler le problème des 'yuons'". Il est allé faire
campagne près de la frontière vietnamienne,
promettant même qu'il tenterait, s'il était élu, de
récupérer l'île voisine de Phu Quoc.
"Il n'est pas question d'être raciste", se défend
le prince Norodom Sirivudh, secrétaire-général
du FUNCINPEC. "Le prince ne parle que des
immigrés illégaux, et le mot de 'yuon' n'est pas
forcément péjoratif", assure-t-il dans un
entretien à l'AFP.
Dans l'opposition, le Parti Sam Rainsy (PSR) a lui
aussi utilisé le thème antivietnamien, mais avec
moins d'insistance, afin d'atteindre le PPC de
Hun Sen, donné grand favori par tous les
analystes.
Le PSR a demandé la fermeture de la frontière
avec le Vietnam samedi et dimanche pour
"empêcher des groupes d'immigrants illégaux de
venir au Cambodge voter pour le PPC".
Des Vietnamiens de la diaspora se sont cloîtrés
chez eux en attendant que le scrutin passe.
Ceux qui en avaient les moyens --un chiffre de
2.000 a été avancé-- sont rentrés au Vietnam.
La communauté n'a pas oublié les assassinats
de plusieurs des siens lors des législatives de
1993 et 1998.
Hormis ce thème controversé, les partis ont tous
fait campagne pour un relèvement du niveau de
vie dans ce pays où le revenu annuel par
habitant n'atteint pas 300 dollars.
Le PPC a insisté sur la réduction de la pauvreté.
Il espère faire passer le pourcentage de la
population sous le seuil de pauvreté de 36%
actuellement à moins de 20 % dans les dix ou
quinze prochaines années.
Les autres partis ont fait pleuvoir les promesses.
Les royalistes se sont engagés à des hausses
de salaires, notamment pour les personnels de
l'armée, la police et du corps enseignant, grâce
aux revenus du tourisme, l'une des premières
sources de rentrées.
Sam Rainsy est allé encore plus loin en
promettant une hausse du traitement des
fonctionnaires à 100 dollars, contre 20
actuellement, tout en dénonçant avec virulence
la corruption, son cheval de bataille.
Mais les analystes soulignaient que les thèmes
de campagne et leur cortèges de promesses
comptaient moins que la personnalité des
candidats. Ceux-ci concluaient vendredi un mois
de campagne intense à travers le pays.
Par Pascale Trouillaud - Agence France Presse - 25 Juillet 2003.
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