Hue célèbre, mitigée, sa libération
HUE - Ornée de drapeaux rouges, la ville cité impériale de Hue a célébré
dimanche le 25ème anniversaire de sa prise par les troupes communistes nord-vietnamiennes dans la ferveur
patriotique, mais non sans quelque amertume.
Dès l'aube, une foule dense a commencé à défiler dans l'enceinte du principal stade de la ville, alternant prouesses gymnastiques
et chants patriotiques, pour commémorer la libération de Hue le 26 mars 1975, qui a aussi marqué le début de la débâcle pour
les troupes sud-vietnamiennes et leurs alliés américains.
Un petit contingent de vétérans septuagénaires, hommes et femmes, revêtus d'uniformes élimés mais la poitrine couvertes de
médailles rouge et or, ont participé à cet anniversaire.
"Des centaines sont morts, mais j'ai rencontré des camarades appartenant à mon ancienne unité, a raconté le capitaine Hoang
Trong Tho, 74 ans.
"Je suis très fier, nous sommes un seul et même pays et personne n'est sous domination américaine", a-t-il dit à l'AFP.
Mais pour beaucoup de jeunes gens, soit 60% de la population de l'ancienne capitale impériale, nés après la fin de la guerre, ce
dimanche a paru bien long.
"C'est bien de se souvenir du passé, mais nous avons tant d'anniversaires et les discours sont toujours si longs", a soupiré l'un
d'entre eux alors que la foule se dispersait à la fin des cérémonies.
L'un des principaux discours, prononcé par le secrétaire-général du comité provincial du Parti communiste, Ngo Yen Thi, a
souligné l'importance de l'année 1986 qui a vu le Vietnam s'ouvrir et renoncer à la planification centrale de l'économie.
"Les réformes économiques sont la fierté et l'honneur" du parti et du peuple, a-t-il dit, énumérant les centaines de petites
entreprises privées, les 68 hôtels et les 27.000 familles désormais engagés dans l'économie de marché.
La décision du parti s'est avérée "correcte", a-t-il souligné. Quelque 400. 000 touristes ont visité Hue l'an dernier.
Mais derrière la façade pimpante de ces célébrations, personne n'a cherché à cacher le deuil touchant de nombreux foyers de
Hue.
Dans un petit café du boulevard Le Loi samedi soir, sa jeune propriétaire a expliqué pourquoi sa mère ne serait pas présente
aux cérémonies du lendemain.
"Elle ira sur la plage là où nombre de nos amis sont morts", a-t-elle déclaré, expliquant que sa famille avait fait partie de l'exode
de milliers de civils qui avaient cherché à gagner le sud du pays à pied ou en bateau pour fuir l'avance des forces communistes.
Personne n'avait alors oublié la dernière occupation de Hue en 1968 par les Nord-Vietnamiens qui ont massacré 3.000 civils
avant que les marines américains ne prennent la ville.
La jeune femme, qui est alors une enfant, a ainsi raconté que les troupes sud-vietnamiennes il y a 25 ans ont abattu beaucoup
de civils sur cette plage pour prendre leur place sur les bateaux.
Pourtant, le tourisme à Hue n'a pas grand chose à voir avec la guerre. Peu de GI's américains reviennent sur les lieux de leur
combat et la ville, qui est un peu pour le Vietnam ce que Florence est à l'Italie, se prépare déjà à l'inauguration d'un festival le
mois prochain.
AFP, le 26 Mars 2000.
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