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Le chagrin des expatriés illégaux et de leurs familles

Cette grande région d'altitude du Centre souffre de la peine de ses habitants. Ceux-ci s'inquiètent du sort de leurs proches, qui survivent misérablement en Caroline, aux États-Unis.

En l'espace d'une année, entre 2001 et 2002, de nombreuses personnes issues des ethnies minoritaires du Tây Nguyên (hauts plateaux du Centre) se sont laissées convaincre par de mauvais éléments, ou ont été menacés par ces derniers, ont quitté le pays, la tête pleine d'illusions. Certains voulaient bénéficier d'une quelconque formation aux États-Unis. D'autres étaient incapables de payer leurs dettes. D'autres encore, ayant un certain niveau d'instruction, rêvaient d'une vie facile grâce à un poste dans le soi-disant "État de Dega" monté par Ksor Kok. Après avoir séjourné quelques mois dans les centres de réfugiés, dans les provinces cambodgiennes de Mondulkiri et Ratanakiri, ils ont été conduits vers les États-Unis.

À Gvenk Sbvo, une des quatre villes d'accueil se trouvant au nord de l'État de Caroline, ces gens vivotent au jour le jour sur le sol étranger. Sans abri, ni boulot, ni formation, tout ce qu'avaient promis les fomenteurs de troubles, avant le départ. Ils ne sont pas libres et souffrent d'une discrimination sociale. Comme des animaux sauvages suivis par des chiens de meute. Chaque mois, ces personnes reçoivent une allocation insignifiante par rapport à la cherté de la vie d'ici. Certains acceptent n'importe quelle besogne: nettoyer la vaisselle, balayer les ordures, faire du jardinage, etc. pour avoir en plus de quoi manger. Sans espoir ni raison d'être sur le sol étranger, leurs illusions d'antan éclatent comme des bulles de savon. Le mal du village natal a commencé à ronger leur coeur.

La plupart d'entre eux souhaitent retourner dans le pays. Humiliés, ces gens s'indignent contre ceux qui les ont incités à quitter le pays. Connaissant leur colère, ce Ksor Kok, qui s'arroge le titre de président de l'tat Dega, cherche à les éviter. Mais, le 4 octobre, accompagné de son homme de main Y Duen Buôn Dap, Ksor Kok s'est rendu à Gvenk Sbovo, pour rencontrer les réfugiés nouvellement venus du Tây Nguyên. À peine descendu de la voiture, il a reçu une pluie de coups de poings des réfugiés qui le guettaient. Ksor Kok n'a pu être libéré que grâce à l'intervention de la police. Mais son homme de main Y Duen Buôn Dap a été blessé. La foule a ensuite cassé la voiture de Ksor Kok en continuant de l'injurier.

Mea culpa en cascade

Y Srênh H'Dot, domicilié dans le hameau de Dung, commune de Chu Buar, à Buôn Ma Thuôt, province de Dak Lak, est le père de Y Bon Mlô. Cet étudiant, de 25 ans, de la Faculté de médecine (relevant de l'université du Tây Nguyên), a franchi la frontière vietnamo-cambodgienne en avril 2001. En juin dernier, il a été envoyé aux États-Unis. Dans sa première lettre envoyée à sa famille, Y Bon Mlô n'a pas caché ses regrets. "Il ne m'est pas possible de vivre tranquillement aux États Unis, écrit-il. Ici, on vit comme si l'on n'avait pas d'âme. Il y a aux États Unis des églises, et des pères spirituels, mais je préfère vous revoir au village... Papa et maman, dites à mes frères et à mes soeurs de veiller attentivement sur les brûlis et de faire leurs études. Ne les laissez pas suivre les malfrats ! Je ne veux pas qu'ils connaissent la même situation que moi".

Dans la lettre envoyée à sa femme Ami Nguyêt domiciliée dans le village de Kom Liao, commune de Hoà Thang, ville de Buôn Ma Thuôt, Ama Nguyêt (encore appelé Y Am) se lamente : "Ma famille me manque beaucoup. Mais malheureusement, je ne peux plus revenir. Je souhaite que les membres de notre famille n'écoutent pas les paroles trompeuses. Restez dans le village ! Pour moi, c'est fini... !".

Y Gut E Ban a un ami, Y Hiêp H'môc, domicilié dans le village de Kô Tam, commun de Ea Tu (Buôn Ma Thuôt). Il ne lui a pas caché ses regrets de ses actes irréfléchis. Il a fui le pays pour finalement mener une vie misérable. Y Gut E Ban est déçu, parce qu'il lui est désormais impossible de revoir ses proches. Le 14 octobre, il a appelé au téléphone Y Sit H'môc, son ami intime dans le village de Kô Tam. Pour se plaindre de sa solitude et de son malheur. Y Gut E Ban a fait dire par son ami aux jeunes garçons, ainsi qu'aux habitants du village, de ne pas suivre Ksor Kok, surtout de ne pas quitter le pays. "Il ne faut pas risquer sa vie, car il y a beaucoup de dangers sur le chemin de l'expatriation. C'est douloureux de vivre loin du pays natal".

Dans sa lettre du 10 septembre 2002 adressée à un de ses amis, Y Ser Buôn Tô évoque les actes condamnables de Ksor Kok. "Avec un homme appelé Y B'hâm E Nuôl, Ksor Kok a, en 1964, a rejoint les partisans du Front d'union pour la libération du Tây Nguyên (FULRO). En 1975, il s'est réfugié aux États-Unis. Maintenant, il vit dans l'État de Caroline et gagne chaque jour seulement 6 à 7 dollars... Il y a d'autres personnes qui sont récemment venues en Caroline. Celles-ci voulaient rencontrer Ksor Kok, mais il se cache, de peur d'être frappé ou tué". Voilà la vie de l'homme qui se prétend président du FULRO.

Le désespoir des parents

En application de la politique humanitaire du Parti communiste et de l'État vietnamiens, les autorités et les voisins des familles des expatriés illégaux ne manquent pas de leur venir en aide. Ces familles ont reçu des prêts pour la production ou construire des maisons. Des occasions ont été offertes à leurs enfants pour qu'ils trouvent un emploi ou aillent à l'école. Beaucoup de ces familles ont pu se défaire de leur complexe et s'intégrer en toute quiétude à la communauté. Toutefois, elles sont tristes en pensant à leur mari et à leurs enfants, qui vivotent au loin dans le désespoir.

Tel est le cas de Ami Nguyêt. Son époux, Ama Nguyêt, est parti aux États-Unis, lui laissant sur les bras 5 enfants en bas âge, dont le plus petit n'a que 10 mois. Les nourrir et assurer leurs études constitue une charge trop lourde pour cette femme de constitution fragile. Elle en veut beaucoup à son mari.

Tel est également le cas de Y Srênh H'Dot et sa femme H'Nhi M'lô, du village Dung, commune Chu Buar (Buôn Ma Thuôt). Ils ont pleuré plusieurs jours, quand leur fils aîné est parti. Leur état de santé périclite à vue d'oeil. Le mari a été malade durant deux mois. Son désespoir est infini, ne sachant pas s'il aura l'occasion de revoir son fils avant de quitter ce monde. Le désespoir des époux Y Ky B'krong et H'Bram E Ran est semblable depuis que le 4e de leurs 11 enfants est parti illégalement aux États-Unis. Ils n'ont plus envie de travailler, aussi leur situation financière empire chaque jour.

Par Trang - Le Courrier du Vietnam - 1er Novembre 2002