Quand les exilés reviennent au Vietnam
Depuis quinze ans, de nombreux exilés vietnamiens
reviennent au pays monter leur propre business. En
important leur savoir-faire, ils font évoluer économiquement
et socialement le Vietnam. Sous l'oeil à la fois accueillant et
méfiant des autorités.
Rentrer ou rester ? C'est la question que se posent de nombreux Vietnamiens
exilés à travers le monde. Ils furent des centaines de milliers à fuir leur pays à
partir de 1975, année où le Vietnam du Sud, soutenu par les Américains, tomba
aux mains des troupes communistes. En 1987, le pouvoir vietnamien a, pour la
première fois, autorisé les réfugiés à rentrer. En quinze ans, ils sont 150 000
"Viet Kieu", comme on les surnomme, à être rentrés. Avec un savoir-faire
précieux dans leurs bagages. “Ces exilés ont influencé le Vietnam dans sa
façon de se développer, de fonctionner et de voir les choses. Ils apportent une
connaissance des techniques de management et de commerce, ainsi que des
nouvelles technologies. Ils emploient des centaines de personnes dans
différentes branches de l’économie. Et ils ajoutent sophistication, style et
approche plus générale à une société, qui, en majorité, a longtemps été coupée
des tendances internationales.
Tous ensemble, les 2,7 millions de Vietnamiens
dispersés autours du monde versent 3 milliards de dollars par an au Vietnam par
l’intermédiaire d’envoi de fonds, officiels et officieux. Suffisamment pour
permettre à ce pays, où le niveau de vie est bas, d’équilibrer ses comptes et
d’alimenter ses réserves de devises étrangères”, détaille l’hebdomadaire
“Asiaweek”.Les exilés représentent sans conteste une richesse pour le
Vietnam. Mais l’attitude à leur égard est ambiguë. “Le gouvernement vietnamien
veut voir davantage d’exilés rentrer au pays. C’est pourquoi il prévoit de modifier
plusieurs lois discriminantes à leur égard. Car ces ‘immigrés’ n’ont pas le droit
de posséder des maisons ou des terres, et ils sont aussi davantage taxés sur
toutes sortes de choses, depuis les chambres d’hôtel jusqu’aux billets d’avion.
Les loyers de leurs locaux commerciaux ou de leurs appartements personnels
sont aussi plus élevés que la moyenne et sont invariablement calculés en
dollars.” Mais ce système ne sera pas aboli du jour au lendemain, car ces
mesures ne seraient pas populaires. Les locaux, qui vivent souvent dans des
conditions modestes, voire misérables, ne voient pas tous d’un bon oeil ces
riches “immigrés”. “Certains les considèrent même comme des traites qui ont
fuit le pays pendant que les autres sont restés et ont enduré des années
d’épreuves. De nombreux vieux Vietnamiens estiment que les Viet Kieu ont
déserté leur pays et reviennent maintenant pour exploiter le peuple”, rapporte
“Asiaweek”.
Selon le magazine, les exilés adoptent un profil bas et ne prennent
pas de positions politiques en public. “Mais ils sont suspectés dès que des
mouvements de protestation émergent. Ce fut encore le cas le mois dernier,
lorsque des minorités ethniques ont réclamé des droits dans la région de Pleiku.
Les partis officiels accusent souvent les ‘forces ennemies’ d’être responsables
de ces soulèvements. ‘Forces ennemies’ est un nom de code pour désigner ces
Vietnamiens de l’étranger, comme les militants anticommunistes de Californie
ou bien ceux de la Free Vietnam Alliance basée en France, qui cherchent à
établir une démocratie multipartite.”
Asiaweek, le 9 Mars 2001.
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