Vietnam-France : "le Vietnam est un partenaire important à tous égards"
Partie de zéro il y a une dizaine d'années, la France investit actuellement 80 millions d'euros par an au Vietnam, une priorité dans sa politique de coopération. Le ministre de la Coopération et de la Francophonie, Pierre-André Wiltzer, a accordé une interview au Courrier du Vietnam.
Le Vietnam est l'un des pays prioritaires de la politique de coopération française. Toutefois, les fonds investis ne correspondent pas aux attentes. Quelle est votre opinion ?
Nous sommes partis, il y a une dizaine d'années, sans aucun projet. Nous avons rebâti progressivement, et plus activement encore ces dernières années, une coopération considérée comme importante pour la France, parmi celles qu'elle mène avec d'autres pays. Le critère financier n'est pas le seul. Je vous indique quand même que le montant investi chaque année par la France, dans la coopération franco-vietnamienne, est de l'ordre de 80 millions d'euros. Cette somme est appelée à croître dans les années qui viennent, du fait que nous avons beaucoup de projets communs. Mais, il y a aussi d'autres dimensions dans la coopération franco-vietnamienne en dehors des questions proprement financières. Il y a évidemment une dimension politique que ce soit dans les relations bilatérales, dans la conception que la France et le Vietnam partagent en ce qui concerne la mondialisation, dans la nécessité de préserver le multilatéralisme, c'est-à-dire une société internationale respectant la souveraineté et les identités des peuples. C'est un point très important sur lequel nos deux pays sont entièrement d'accord, de même que la nécessité de protéger la diversité culturelle, de respecter les langues et cultures du monde, de les préserver des risques d'écrasement, d'effacement, etc. Le Vietnam est un partenaire essentiel de la France à tous égards. C'est un peuple ami et proche, avec 80 millions d'habitants, au développement accéléré. D'innombrables points nous intéressent dans le cadre de notre coopération.
La coopération économique est un des contenus majeurs, mais l'écart de développement entre les deux pays est important. Ne craignez-vous pas les risques inhérents à la délocalisation pour les entreprises françaises s'implantant au Vietnam ?
Sur cette question de délocalisation, il y a effectivement un mouvement mondial qui fait que les entreprises de certains secteurs cherchent à implanter leurs unités de production dans des pays où les coûts de revient sont moins élevés, et la main-d'oeuvre meilleur marché. Cela ne concerne pas seulement le Vietnam. C'est la chance pour ce pays qui, actuellement, offre des coûts salariaux moins élevés. Mais quand il se développera, les salaires augmenteront. Par conséquent, il perdra cet avantage. Je ne crois pas qu'il faille regarder les relations économiques entre la France et le Vietnam à travers ce problème-là. Il y a d'ailleurs très peu de cas et je pense, au contraire, que la croissance des relations économiques, même si elle profite à l'un, bénéficie aussi à l'autre, d'une manière ou d'une autre. Par conséquent, nous ne devons pas, nous les Français, avoir peur quand on élargit le champ de la coopération avec un pays comme le Vietnam, de voir s'enfuir nos entreprises. Il y a beaucoup d'autres raisons pour une entreprise de s'installer à tel ou tel endroit. Et puis, si une société française s'implante au Vietnam, elle va créer de l'activité, contribuer à la croissance du pays et rapporter également des intérêts à la France. Je pense que le développement est toujours mutuellement profitable.
Quelle sera votre politique pour impulser la croissance de la francophonie au Vietnam ?
S'agissant de la langue française à travers la francophonie, il nous est important effectivement que le français puisse reconquérir une place qu'il a eue dans des périodes relativement anciennes, mais qu'il n'a jamais complètement perdu. Il est vrai qu'il y a du chemin à faire pour que l'enseignement du français s'intensifie, et nous y consentons beaucoup d'efforts. Nous avons plus de 700 classes bilingues, octroyons un grand nombre de bourses (plus de 2.500 Vietnamiens étudient dans des établissements français), etc. Beaucoup de projets sont également déployés au Vietnam dans le domaine universitaire. En particulier, nous travaillons en ce moment, avec nos amis vietnamiens et d'autres partenaires, à la mise sur pied d'un projet d'université française au Vietnam. Nous souhaitons pouvoir rapidement offrir dans un délai de deux ou trois ans au maximum, des possibilités d'une formation de qualité aux étudiants vietnamiens qui souhaitent se former en français sur place.
Par Thu Hà Nguyên - Le Courrier du Vietnam - 2 Novembre 2003.
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