Mesures drastiques au Vietnam contre la grippe aviaire,
la Thaïlande accusée
HANOI - Le Vietnam a ordonné l'abattage massif de poulets dans
12 régions du pays contaminées par la grippe aviaire et a
interdit toute vente à Ho Chi Minh-Ville, la capitale
économique du sud, alors qu'une association de consommateurs
accusait la Thaïlande de dissimuler un foyer
d'épidémie. Quatre pays d'Asie - Vietnam, Corée du
sud, Taïwan et Japon - sont désormais touchés par la
grippe aviaire.
Les autorités vietnamiennes affirment que 13 personnes sont
mortes de la maladie, mais l'Organisation mondiale de la santé
(OMS) n'a jusqu'à présent confirmé que trois
décès, et attend les résultats pour trois autres
d'ici une bonne semaine.
Taïwan a achevé vendredi l'abattage de 20.000 poulets,
décidé jeudi par mesure de précaution après
la découverte d'un foyer de grippe aviaire dans un
élevage du centre de l'île. Une vingtaine de fermes ont
été inspectées autour de ce foyer. Toutes
étaient saines. Le virus en cause, le H5N2, est moins virulent
que le H5N1 responsable des décès au Vietnam, et ne se
transmet pas de l'oiseau à l'homme. Les autorités
taiwanaises veulent cependant éviter une propagation de la
maladie chez les volailles, et tout risque de mutation du virus qui
deviendrait alors dangereux pour l'homme. Le Japon, touché pour
la première fois depuis 1925 par la grippe du poulet, a interdit
les importations de poulets en provenance de Taïwan, et
commencé à enterrer les carcasses de près de
35.000 volailles qui ont pu être contaminées par
l'épizootie dans une ferme de l'Archipel.
Depuis vendredi, l'ex-Saïgon, une mégalopole de 7 millions
d'habitants, n'est plus approvisionnée en poulets, et 12
régions du Vietnam concernées par des foyers d'infection
importants du H5N1 ont reçu l'ordre d'abattre l'ensemble du
cheptel. "Le ministère de l'Agriculture a décidé
de tuer tous les poulets de ces zones d'épidémies", a
indiqué à l'AFP Dau Ngoc Hao, directeur adjoint du
Département vétérinaire du ministère de
l'Agriculture. Dix-huit autres provinces ont déclaré des
foyers mineurs, sans que les autorités jugent approprié
pour l'instant l'abattage systématique. Au total, le Vietnam
connaît donc des foyers d'importance diverse dans 30 de ses 64
provinces.
Vendredi par ailleurs, une association de consommateurs a accusé
le gouvernement thaïlandais de dissimuler une
épidémie de grippe aviaire. Le 4ème exportateur de
poulets du monde et numéro un en Asie a affirmé ne pas
être concerné par le virus, bien que 400.000 poulets y
soient officiellement morts, depuis deux mois, de bronchite et de
choléra, ou aient été tués pour
éviter une propagation de ces épidémies.
Le président d'une association de consommateurs, la Consumer
Force Association, a déclaré avoir parlé à
de nombreux éleveurs persuadés que leurs poulets
étaient morts de la grippe aviaire. "Le gouvernement leur donne
40 baht (moins d'un euro) par poulet pour qu'ils se taisent", a-t-il
affirmé.
Au Vietnam, aucun chiffre n'a été donné sur le
nombre d'animaux qui seront abattus. L'évaluation est d'autant
plus compliquée que les propriétaires sont très
nombreux et que les poulets vivent non pas dans des fermes bien
délimitées, mais un peu partout dans les villages. Anton
Rychener, directeur de l'organisation des Nations unies pour
l'alimentation et l'agriculture (FAO) à Hanoï, a
estimé que l'interdiction de vente sur Ho Chi Minh-Ville
pourrait être étendue si le virus continuait de se
propager. Comme l'an passé, lors de l'épidémie de
Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), les experts
veulent éviter que tous les syndromes respiratoires soient
automatiquement attribués à la grippe du poulet.
Agence France Presse - 16 Janvier 2004
Les autorités sanitaires internationales redoutent
une épidémie humaine de la "grippe du poulet"
Le Vietnam, où l'épizootie fait actuellement des ravages
parmi les oiseaux d'élevage, fait état d'au moins trois
cas, mortels, où la grippe aviaire aurait franchi la barre des
espèces.
Les autorités sanitaires vietnamiennes ont annoncé, jeudi
15 janvier, que le virus de la grippe aviaire (ou "grippe du poulet")
avait franchi la barrière d'espèce et était
à l'origine d'un début d'épidémie humaine.
Ce virus qui, d'ores et déjà, a tué entre un et
deux millions de volatiles dans les élevages vietnamiens est
fortement soupçonné d'être l'agent pathogène
à l'origine de la contamination, ces derniers jours, de dix-huit
personnes parmi lesquelles treize - onze enfants et deux adultes - sont
décédées.
Les spécialistes de l'Organisation mondiale de la santé
(OMS) n'ont pas encore confirmé de lien entre le virus de la
maladie aviaire et celui seulement retrouvé chez l'homme dans
trois cas, deux enfants et un adulte. Cette corrélation a
été faite sur la base de travaux de virologie
effectués à Hongkong, qui doivent être
confirmés par d'autres, actuellement en cours au Japon.
Selon les biologistes, Le virus de la grippe aviaire, de type H5N1, est
similaire à celui qui fut à l'origine, en 1997 à
Hongkong, d'une alerte internationale sans précédent.
Cette mesure de précaution avait alors été prise
eu égard aux risques majeurs que représente la
contamination de l'espèce humaine par ce type d'agent
infectieux, potentiellement mortel et contre lequel on ne dispose
d'aucun traitement curatif ou préventif.
MUTATIONS GÉNÉTIQUES
Dès le 14 janvier, l'OMS a annoncé que
l'épidémie virale au Vietnam pourrait rapidement avoir
des conséquences sanitaires internationales d'une tout autre
portée que celles dû au virus, récemment
identifié, responsable du syndrome respiratoire aigu
sévère (SRAS).
L'inquiétude actuelle des virologistes et des autorités
sanitaires internationales se fonde sur l'hypothèse, selon
laquelle les incessantes mutations génétiques des virus
grippaux affectant les animaux et les hommes constituent une menace
majeure pour la santé publique planétaire. Responsable de
25 millions de morts dans la deuxième décennie du XXe
siècle, la pandémie de la "grippe espagnole" a
démontré l'ampleur de la menace que constitue
l'apparition de nouveaux virus grippaux.
En 1997, l'épidémie de "grippe du poulet" n'avait pu
être contenue que grâce à une intense mobilisation
internationale et la mise en œuvre d'une politique drastique
d'abattage, à Hongkong et dans la région, de dizaines de
millions d'oiseaux d'élevage.
Jeudi 15 janvier, le gouvernement chinois a imposé la mise en
quarantaine des personnes en provenance de Corée du Sud, du
Japon et du Vietnam, pays désormais officiellement
considérés comme touchés par cette maladie virale
aviaire. Un doute subsiste quant à la présence d'une
épidémie aviaire en Thaïlande.
Les autorités
sanitaires chinoises ont demandé que soient prises de nouvelles
mesures sanitaires strictes, au premier rang desquelles le
contrôle des températures corporelles et l'enregistrement
des conditions de santé des personnes en provenance de ces pays.
Pour leur part, les autorités sanitaires vietnamiennes ont,
vendredi 16 janvier, ordonné la destruction des poulets dans
douze des soixante-quatre provinces du pays dorénavant
considérées comme des zones d'endémie. Cette
mesure préventive ne concerne pas, pour l'instant, dix-huit
autres provinces dans lesquelles des foyers mineurs
d'épidémie ont été observés.
"Dans une situation de ce type, il est impératif de lancer une
alarme solennelle au risque d'être par la suite démenti
par les faits, déclare le professeur Jean-Claude Manuguerra,
responsable du centre de référence pour les virus
grippaux à l'Institut Pasteur de Paris. On sait que des virus
aviaires du type de celui qui inquiète les autorités
vietnamiennes circulent dans de nombreux pays asiatiques et de nombreux
facteurs sont réunis pour qu'une épidémie humaine
puisse émerger."
Par Jean-Yves Nau - Le Monde - 16 Janvier 2004
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