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le "doi moi" a du plomb dans l'aile


HANOI - Malgré une économie encore en transition et qu'on aurait pu croire imperméable aux aléas extérieurs, le Vietnam communiste a été rattrapé cette année par la crise asiatique et va devoir prendre dès 1999 des mesures radicales d'assainissement, comme ses voisins.

Cette année s'achève sur le plus mauvais taux de croissance enregistré par le Vietnam après une décennie flamboyante qui avait vu, grâce à la politique d'ouverture économique du "doi moi", le Produit intérieur brut progresser chaque année de plus de 8%.

Il aura fallu attendre l'été pour que le gouvernement prenne acte de la crise en revisant son objectif de croissance : entre 5 et 6 % contre les 9% prévus. Les institutions financières internationales prévoient de leur côté à peine 4%. Le Premier ministre Phan Van Khai a averti que l'année prochaine serait "encore plus difficile".

Avec une monnaie non-convertible, le dong, et en l'absence d'une bourse, le Vietnam s'était cru immunisé contre la crise financière et monétaire qui s'est abattue sur la région après être partie de Bangkok en juillet 1997.

Mais Hanoï dépend à 70% de l'Asie de l'est, Japon inclus, pour ses échanges commerciaux comme ses investissements étrangers.

Après plusieurs années d'envolée qui avaient donné à Ho Chi Minh-Ville (sud) ou Hanoï l'apparence de chantiers livrés jour et nuit aux pelleteuses, les nouveaux investissements étrangers ont plongé du nez cette année (-60%) dans un mouvement largement imputable à la quasi-absence d'investisseurs des huit partenaires de Hanoï dans l'Association des nations d'Asie du sud-est (Asean).

Le chômage s'est aggravé avec les fermetures d'entreprises. Et à un moment où le pays a un besoin crucial de devises pour poursuivre son développement, les exportations stagnent : les produits vietnamiens sont devenus bien moins compétitifs sur des marchés asiatiques aux monnaies fortement dévaluées.

Selon tous les économistes, la crise accentue la pression sur Hanoï en faveur de réformes économiques en profondeur, en premier lieu une restructuration des entreprises étatiques --gouffre pour les finances de la nation et peu génératrices d'emplois-- et d'un secteur bancaire surendetté et inopérant.

"La situation est très sérieuse, pour éviter une aggravation il faudra une accélération des réformes", selon un rapport de la Banque mondiale publié cette semaine qui note que la crise est arrivée à un moment où la politique de "doi moi" marquait le pas depuis 1995.

"1997 a été la deuxième année sans réelle réforme", explique de son côté Jean-Pierre Verbiest, représentant de la Banque asiatique de développement (BAD), même si "cette année il y a eu quelques progrès vers une libéralisation commerciale ou des privatisations".

Les voisins asiatiques du Vietnam ont déjà retroussé leurs manches et pris des mesures d'assainissement et de libéralisation, mais aucune réforme de fond ne peut être mise à l'actif de l'équipe au pouvoir depuis un an à Hanoï.

Le handicap du pays communiste qui avance en tâtonnant vers une vraie économie de marché menace donc de s'accroître.

Enfant particulièrement gâté depuis 1993 par la communauté des bailleurs de fonds internationaux et multilatéraux, le Vietnam pourrait entendre la semaine prochaine à Paris, lors de la réunion annuelle des donneurs sous l'égide de la Banque mondiale, une musique moins douce à ses oreilles.

"Il est essentiel que des actions soient prises maintenant et non pas reportées", avertit la Banque mondiale, sinon " les progrès réalisés depuis une décennie en matière de réduction de la pauvreté risquent d'être anéantis".

AFP, le 09 décembre 1998.