La nouvelle direction du Vietnam face au défi de l'ouverture économique
Le IXe congrès du Parti communiste s'est clos, dimanche 22 avril, à
Hanoï, sur une promesse du nouveau secrétaire général du parti,
Nong Duc Manh, d'engager une "lutte sans relâche" contre la
corruption.
HANOI - Une direction communiste largement remaniée va s'employer à
poursuivre, à pas sages, l'ouverture du Vietnam sur le reste du monde.
Tel est le résultat du IXe congrès du Parti communiste vietnamien, qui
s'est clos, dimanche 22 avril à Hanoï, sur une promesse du nouveau
secrétaire général du parti, Nong Duc Manh, d'engager une "lutte sans
relâche" contre la corruption et de continuer des réformes entreprises en
1986 et menées depuis avec plus ou moins de bonheur.
Même si la construction d'une "économie de marché à orientation
socialiste" demeure l'objectif affiché, la langue de bois a perdu du terrain.
Phan Van Khai, premier ministre depuis 1997, n'a pas hésité à confier,
non sans candeur et dans un clin d'œil inquiet à l'implosion de l'Indonésie,
que "le Vietnam tente d'éviter" le processus dont sont victimes "certains
pays" où "une crise économique a provoqué l'instabilité politique".
Surtout, sans attendre la proclamation officielle des votes, des "anciens"
du PC n'ont pas caché que les jeux étaient déjà faits, rompant ainsi avec
un fort penchant pour le secret. Do Muoi, 84 ans et secrétaire général du
PC de 1991 à 1997, a déclaré dès jeudi que, tout en ayant "apporté une
importante contribution au parti", son successeur avait "également
commis des erreurs".
Le général Lê Kha Phieu, numéro un de 1997 à
2001, était donc déjà bel et bien limogé.
Vo Van Kiêt, 79 ans, a été plus cinglant en jugeant
samedi que "tout secrétaire général qui se sépare
du parti ne peut pas œuvrer" avec efficacité.
L'ancien premier ministre (1991-1997) a également
estimé que le bureau politique sortant avait reçu
un avertissement à propos "des abus concernant
l'utilisation des services de renseignement à des
fins partisanes", allusion directe à la création, par Lê Kha Phieu, d'un
service non agréé de renseignement connu sous le label d'A-10. Cette
initiative hasardeuse semble avoir précipité la sortie prématurée de
l'ancien chef du département politique de l'armée et encouragé un
renforcement du contrôle du comité central, dont le secrétariat a été
restauré, sur le bureau politique, dont le comité permanent a été
supprimé.
Plus de transparence
Le ménage ainsi fait par les "anciens", qui affirment avoir tiré leur
révérence en abandonnant toute fonction officielle, a été apparemment
apprécié au sein d'un appareil menacé de sclérose. Le bureau politique
est sorti rajeuni de l'empoignade. Surtout, il compte sept membres
originaires du Sud, une première pour les représentants du principal pôle
de développement économique du pays. L'Armée populaire, en revanche,
rentre plutôt dans le rang, avec 10 % seulement des sièges au sein du
comité central.
Plus transparents que par le passé, ces rééquilibrages collent avec la
poursuite prudente de réformes. Les déficits fréquents des entreprises
publiques, qui ne survivent que grâce à des subventions, ont été
sèchement dénoncés. En 2000, une nouvelle loi a permis de doubler le
nombre des micro-sociétés, et celle sur les investissements étrangers a
été amendée pour faciliter, notamment, la gestion des sociétés mixtes.
Geste symbolique, une petite Bourse s'est ouverte à Ho Chi Minh-Ville.
Cette année enfin, un accord a été signé, avant la tenue du congrès,
avec le Fonds monétaire international (FMI), et un autre avec la Banque
mondiale va suivre.
Tout se passe, explique un banquier étranger, comme si, au sein du PC,
"même les conservateurs se sont rendus à l'évidence que leur modèle
avait atteint ses limites et que, pour rester au pouvoir, il fallait ouvrir le
pays". "Leur modèle, ajoute-t-il, ne leur offre pas les moyens de fournir
des emplois au million de jeunes qui rejoignent le marché chaque
année."
Par Jean Claude Pomonti - Le Monde, le 23 April 2001.
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