Le Parti communiste vietnamien ouvre son 9ème congrès
HANOI - Le Parti communiste vietnamien (PCV) a entamé jeudi à
Hanoi son 9ème congrès quinquennal après plusieurs mois d'âpres luttes au sein de sa
direction qui vont déboucher sur le limogeage du numéro un vietnamien Le Kha Phieu
et son remplacement par le président de l'Assemblée nationale Nong Duc Manh.
Tous les dirigeants du PCV, l'un des derniers partis communistes au pouvoir au monde, les responsables du
gouvernement et près de 1.200 délégués, sont réunis pour quatre jours dans la salle des congrès de Ba Dinh,
au centre de la capitale vietnamienne, où le PCV entérinera les choix politiques et économiques du pays pour
les cinq ans à venir.
Le secrétaire général du PCV Le Kha Phieu a présenté jeudi matin aux délégués, sous un buste géant de Ho
Chi Minh, fondateur du Vietnam communiste, et sous les portraits de Marx et de Lénine, le rapport politique
du congrès qui dresse un état des lieux des succès et échecs du Parti depuis le dernier congrès tenu en 1996.
Le rapport lu par M. Phieu reconnait ouvertement que le Parti a connu, pendant son mandat, des "faiblesses et
erreurs", notamment "un clivage entre riches et pauvres qui se creuse rapidement entre la ville et la campagne",
et une "corruption persistante dans l'appareil du sytème politique" qui "constitue une menace pour la survie de
notre régime".
La Parti doit également faire plus pour "lutter contre la discrimination ethnique et la division", a noté M. Phieu
dans une référence explicite aux tensions ethniques qui ont agité le pays au cours des derniers mois et ont joué
un rôle important dans son limogeage.
M. Phieu, qualifié par des responsables de "pire chef du PCV" dans son histoire, cèdera sa place à l'issue du
congrès à Nong Duc Manh, qui deviendra le premier membre d'une ethnie minoritaire du Vietnam à accéder au
poste de numéro un vietnamien.
M. Manh, 61 ans, membre de l'ethnie Tai du nord du Vietnam, a été choisi pour être le nouveau secrétaire
général du PCV lors du "pré-congrès" du Parti réuni peu avant le congrès.
L'enjeu réel de ce congrès depuis des mois a été, plus que la ligne politique et les orientations économiques du
pays, la question du choix des dirigeants.
Elle a été débattue pendant plus d'un an au sein du PCV et a donné lieu à des affrontements sans précédent
entre les clans conservateur et réformiste qui s'équilibrent au sommet du Parti et de l'Etat.
La nomination de M. Manh, un modéré, à la tête du Vietnam doit être annoncée pendant le congrès et est
considérée par les analystes comme un compromis entre ces différents clans.
Le limogeage du chef conservateur Le Kha Phieu avait été réclamé par le comité central du PCV car son
action à la tête du pays était considérée comme trop terne.
Les principaux mentors du Parti, Do Muoi, Le Duc Anh et l'ancien Premier ministre Vo Van Kiet avaient rendu
publique une lettre en octobre dernier accusant explicitement Le Kha Phieu d'avoir démontré un "manque de
capacité dans la direction du Parti et de l'Etat".
La publication de cette lettre au sein du Parti était une première au Vietnam où les luttes au sein du pouvoir
sont habituellement menées dans la plus grande discrétion.
"Jamais un dirigeant n'avait été critiqué nommément et publiquement de cette manière", a remarqué un analyste.
M. Phieu, premier chef du PCV limogé avant la fin de son mandat quinquennal, a tenté de regrouper ses
partisans et de mettre en échec les décisions du comité central du PCV à l'occasion du "pré-congrès".
Il a notamment tenté de s'assurer le soutien des clans conservateurs, des services de sécurité et de l'armée pour
conserver son poste en faisant valoir qu'il représentait un gage de stabilité pour le Vietnam, agité par des
troubles au cours des derniers mois.
En février, des milliers de membres des ethnies minoritaires avaient manifesté dans les Hauts-plateaux pour
réclamer la restitution de leurs terres ancestrales qu'ils estiment avoir été confisquées par des membres de
l'ethnie vietnamienne majoritaire dans le pays (kinh, ou viet) et l'armée avait été envoyée sur place pour rétablir
l'ordre.
Ces manifestations ont pesé sur toutes les réunions préparatoires du congrès, et ont contribué au limogeage de
Le Kha Phieu qui n'a su ni prévoir, ni régler rapidement les conséquences de cette agitation survenue alors que
le PCV préparait déjà son congrès.
Agence France Presse, le 19 Avril 2001.
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