~ Le Viêt Nam, aujourd'hui. ~
Le portail de l'actualité vietnamienne

Année :      [2004]      [2003]      [2002]      [2001]      [2000]      [1999]      [1998]      [1997]

Chirac au Vietnam en champion de la spécificité culturelle

Le président de la République a plaidé contre l'uniformisation qu'apporterait l'hégémonie américaine

HANOI - «Qui ne se souvient pas de son pays natal ne pourra jamais devenir un homme.» Le débat organisé, hier, au Centre culturel français de Hanoï, avait pourtant commencé sous de bons auspices. Comme souvent, surtout lorsqu'il fait allusion à l'Asie, Jacques Chirac avait cité en préambule un proverbe – attribué à un poète vietnamien –, censé appuyer son propos introductif sur le respect des cultures et la diversité culturelle. Du classique. Dans la plus pure tradition chiraquienne. Mais, au fil du dialogue organisé entre le chef de l'État français et des étudiants vietnamiens peu rebelles, le ton a quelque peu évolué. Jacques Chirac, soucieux de convaincre son auditoire de la nécessité de défendre sa spécificité culturelle, s'est en effet laissé allé à son péché mignon : fustiger la toute-puissance américaine. Et asseoir ainsi sa posture d'homme qui doit dire non aux États-Unis. Que ce soit concernant la diversité culturelle ou la défense d'une taxation internationale sur les richesses produites par la mondialisation.

Le président français, dont un conseiller se réjouissait, il y a quelques jours, de venir participer au Vietnam à un sommet, l'Asem, auquel les Américains ne participent pas, «ce qui permet une certaine liberté de parole», ne s'est pas autocensuré, c'est le moins que l'on puisse dire. Évoquant «une sorte de combat contre les thèses américaines» défendues au sein de l'Organisation mondiale du commerce (selon lesquelles les biens culturels sont des biens marchands comme les autres), il n'a pas mâché ses mots : «Si nous avançons vers un monde où il y aurait une seule langue, une seule culture» cela conduirait «à un rétrécissement de la pensée» ; «ce serait une véritable catastrophe écologique», a-t-il même ajouté dans des termes qui rappellent ceux qu'il avait utilisés lors du pillage du musée de Bagdad, en évoquant une catastrophe «huma-nitaire». C'est tout ? Non. Soulignant le risque «de finir par avoir une espèce de sous-culture générale dans le monde, ce qui serait la pire des situations», Jacques Chirac a aussi pointé du doigt le risque que «toutes les expressions culturelles soient étouffées au bénéfice de la seule culture américaine». Étrange paradoxe : pour appuyer sa démonstration, le président français, défenseur de longue date de l'exception culturelle, en est même venu à expliquer à ces étudiants de la République socialiste du Vietnam pourquoi seules des aides publiques leur permettraient de sauvegarder leur culture...

Pour mieux convaincre, Jacques Chirac, qui a souligné que les États-Unis «ayant beaucoup de moyens, ils peuvent s'imposer sur les marchés sans aides de l'État», a ajouté que les «deux films importants» du cinéma vietnamien (Le Gardien de buffles et Le Temps révolu) étaient des films aidés. Cet argument, de même que les thèses universalistes qu'il a développées («tout pays, quel que soit son niveau culturel, a intérêt à connaître la culture des autres (...) ce qui est dans le cerveau des autres dans le monde est un bien précieux»), a-t-il porté ? C'est à voir. Alors que le Vietnam est en pleine négociation d'accession à l'OMC, la petite musique française même si elle est soutenue par ses partenaires européens, comme on le souligne dans l'entourage du chef de l'État français, doit affronter une sérieuse concurrence. Les Vietnamiens choisiront-ils l'option américaine, qui est favorable à une ouverture commerciale maximale, englobant les secteurs audiovisuel et culturel, ou l'option française, qui soutient une dérogation pour les biens culturels ? «Pour l'instant, ils balancent», confie un conseiller de Jacques Chirac.

Les Français espèrent en tout cas que les engagements pris par le Vietnam dans le cadre de la francophonie l'inciteront à faire «le bon choix». Quand on voit combien le français a reculé dans cette ancienne colonie française (seules 375 000 personnes parlent aujourd'hui le français), on peut en douter. Et Jacques Chirac, quand il a été interrogé, hier matin, par une jeune étudiante sur l'intérêt du pays à connaître la culture et la langue française, a été moins convaincant que lorsqu'il parle du poète chinois Du Fu : «La culture française, c'est une vision de l'homme, une certaine universalité», c'est aussi «des manifestations d'une grande qualité dans le domaine littéraire musical. Il y a des oeuvres d'art qui méritent d'être connues», a-t-il ainsi avancé.

Par Anne Fulda - Le Figaro - 8 Octobre 2004


Le président français plaide pour la diversité des langues et des cultures

HANOI - Le président français Jacques Chirac qui a défendu jeudi à la veille du 5e Sommet Asie-Europe (Asem 5) à Hanoi la diversité des langues et des cultures, a exhorté à bâtir le monde de demain plus prospère, plus pacifique et respectueux des identités et des cultures de chacun.

Face à plus d'une centaine de jeunes étudiantes et étudiants vietnamiens réunis à l'Espace, le nouveau centre culturel français de Hanoi, M. Chirac a plaidé pendant une heure et demie pour les efforts de la France en faveur de la diversité culturelle, notamment au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Cette rencontre avec les jeunes a eu lieu au second jour de la deuxième visite d'Etat au Vietnam du président français Jacques Chirac, avant l'Asem 5 qui doit s'ouvrir vendredi matin dans la capitale vietnamienne et réunir 38 chefs d'Etats et ministres des Affaires étrangères de l'Asie et de l'Europe.

"Vous êtes ici celles et ceux qui représentent la prodigieuse vitalité d'un pays dont la croissance est forte, la deuxième en Asie, et dont la jeunesse est grande, ce qui représente une force et aussi une épreuve", a-t-il déclaré. Il a estimé que cette épreuve s'expliquait par le fait qu'il faut "satisfaire, permettre l'épanouissement d'une population jeune si importante, et une force, car naturellement la force réside essentiellement dans l'âge, dans la jeunesse, dans la capacité à s'adapter à une société moderne, dans la possibilité de mobiliser son énergie, son intelligence au service du bien-être d'une société".

Répondant aux questions posées en français d'une demi-douzaine d'étudiants autour du thème "formation et diversité culturelle", le chef de l'État français a exhorté la jeunesse vietnamien à "trouver des voies pour que le monde de demain soit plus prospère, plus pacifique et plus respectueux des identités et des cultures de chacun".

M. Chirac a aussi plaidé pour l'apprentissage du français dans ce pays de 80 millions d'habitants membre de la Francophonie. "Il faudrait faire un effort. Est-ce que cet effort vaut la peine, je crois que oui. Une langue, c'est d'abord une ouverture sur une autre culture, et donc une autre vision des choses". Actuellement, 150 universités et 90 établissements de recherche en France accueillent les étudiants vietnamiens, et environ un millier d'étudiants vietnamiens suivent les programmes de formation de haute qualité en France.

Le leader français a promis d'accroître l'accueil des étudiants vietnamiens en France, au nombre de 2.500 dont 600 boursiers. Il a rappelé que la France et le Vietnam avaient signé mercredi un accord pour la création de pôles universitaires français à Hanoi et Ho Chi Minh-Ville avec la volonté de former les élites. "La France est le premier pays en Europe et le troisième pays dans le monde, après les Etats-Unis et l'Australie, pour ce qui concerne les jeunes Vietnamiens qui viennent faire leurs études", a fait savoir le président français.

M. Chirac a mis l'accent sur les places particulières du Vietnam et de la France au sein de l'Asem 5 et a rappelé le soutien de la France à l'adhésion du Vietnam à l'OMC et à sa candidature à un siège de membre non permanent du Conseil de sécurité de l'ONU pour les années 2008 et 2009.

Agence Vietnamienne d'Information - 7 Octobre 2004