La bourse d'Ho Chi Minh Ville portée par une exhubérance irrationelle
HO CHI MINH VILLE - Alors que les bourses du
monde entier subissent des soubresauts dus à la réduction de la croissance globale,
la bourse d'Ho Chi Minh-Ville, l'ancienne Saïgon, a presque quadruplé sa
capitalisation en moins d'un an d'existence, faisant de cette place l'une des plus
performantes du monde, tout du moins sur le papier.
Mais les autorités communistes vietnamiennes ne fanfaronnent pas, conscientes de
l'irrationalité qui a marqué la hausse vertigineuse des cours des 5 sociétés cotées en
bourse dans le pays.
"Les gens voient les cours monter et ils espèrent des profits plus importants, alors, ils
veulent acheter des actions et personne n'est vendeur, ce qui entraine une hausse des
cours totalement injustifiée", estime un analyste.
L'index de la bourse de l'ex-Saigon, la première à ouvrir ses portes au Vietnam, avait été fixé à 100 points lors
du début de ses opérations en juillet dernier: il a atteint plus de 390 points ces dernières semaines.
"Les investisseurs publics manquent de connaissance de la marche de la bourse", note Tran Dac Sinh,
responsable de la bourse.
M. Sinh estime que la bourse, pour prendre sa place sur le marché international, aura besoin de sociétés mieux
structurées, d'une législation mieux adaptée au marché et de l'implication d'investisseurs étrangers.
Mais l'économie du Vietnam communiste demeure isolée sur la scène globale, et reste dominée par des
entreprises d'Etat inefficaces.
Les sources d'informations économiques indépendantes, considérées indispensables pour le bon
fonctionnement d'une bourse, restent également virtuellement inexistantes dans le pays.
M. Sinh précise que toutes les informations dont disposent les courtiers leurs sont fournies par la Commission
boursière nationale et que "les rumeurs n'affectent pas le marché".
La création de la bourse, longtemps attendue par les investisseurs étrangers, fait partie du plan gouvernemental
visant à ouvrir le Vietnam à l'économie de marché dans le cadre de la politique de "doi moi" (renouveau), mais
les analystes, qui rendent hommage à cet effort, estiment qu'il reste encore un long chemin à parcourir.
Le volume de transactions d'une session dépasse rarement 6.000 dollars et 97% des investisseurs sont des
particuliers, 2% des institutions vietnamiennes et 1% des investisseurs étrangers.
Seules cinq sociétés sont jusqu'à présent cotées en bourse et les investisseurs étrangers doivent obligatoirement
passer leurs ordres par le biais du seul bureau de courtage agréé par l'Etat.
Les étrangers sont également tenus de conserver leurs actions un minimum d'un an avant de les revendre,
période portée à 3 ans pour ceux qui dirigent une société dans le pays.
Mais la société qui connait le plus fort succès, Haiphong Paper Company (Hapaco) a vu son cours passer de
19.000 dongs (1,40 dollar) lors de son introduction il y a un an, à un sommet de 104.000 dongs (8 dollars) le
26 mai dernier.
Pour chaque action mise en vente, on enregistre dix offres d'achat et Hapaco a récemment été rappelée à
l'ordre par les autorités pour avoir "donné des informations" sans approbation officielle.
"Il y a peu de liquidités sur le marché et, contrairement à ce qui se passe ailleurs, c'est le nombre des acheteurs
et des vendeurs qui influe sur les cours", estime un agent en bourse, M. Nguyen Hieu.
M. Hieu précise qu'il possède lui-même des actions, avant qu'une panne d'électricité n'obscurcisse les tableaux
d'affichage des cours, entrainant l'interruption de la séance.
Agence France Presse, le 1er Juin 2001.
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