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Un dissident en résidence surveillée après une enquête sur les frontières

HANOI - Le journaliste et dissident Bui Minh Quoc, dont l'interpellation et la mise en résidence surveillée ont été confirmées jeudi par les autorités vietnamiennes, paye le prix d'une enquête qu'il a menée sur d'éventuelles concessions territoriales du Vietnam à son voisin chinois, estiment des diplomates.

Le dissident Bui Minh Quoc a été "placé sous surveillance administrative pour avoir violé la loi vietnamienne", a indiqué le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Mme Phan Thuy Thanh, confirmant un rapport de l'association française de défense de la liberté de la presse Reporters sans frontières (RSF) publié jeudi. Mais selon un journaliste vietnamien réfugié en France cité par RSF, l'interpellation et la mise en résidence surveillée de Bui Minh Quoc sont liées à une enquête qu'il a menée pendant plus d'un mois dans le nord du pays sur la situation des zones frontalières avec la Chine.

La mise en résidence surveillée de Quoc est un signe de l'extrême sensibilité des autorités communistes de Hanoï aux critiques des accords frontaliers signés au cours de l'année 2000 par les deux voisins idéologiques, ont indiqué à l'AFP des diplomates en poste dans la capitale vietnamienne. Le Vietnam et la Chine ont ratifié au cours de l'an 2000 un traité sur la délimitation de leur frontière terrestre commune et signé une "déclaration conjointe" sur la délimitation du golfe du Tonkin, destinés à mettre fin au contentieux frontalier issus de la brêve mais sanglante guerre frontalière sino-vietnamienne de 1979.

"Il est faux de prétendre que M. Quoc a été arrêté pour avoir critiqué des concessions vietnamiennes (lors d'accords frontaliers) qui ont été établis sur la base de l'égalité et du bénéfice mutuel", a affirmé le porte-parole du ministère. Mais un diplomate asiatique a noté que des concessions territoriales de Hanoï à la Chine ont entrainé au cours de l'année écoulée de fortes critiques des nationalistes au sein des forces armées vietnamiennes ainsi que de la part d'anciens responsables du Parti communiste vietnamien (PCV) devenus critiques sur le régime.

Selon ce diplomate, la Chine s'est vu accorder par Hanoï dans ces accords la majorité des zones frontalières contestées dans le nord du Vietnam qui avait été envahi par les troupes chinoises lors du conflit, dont des terres agricoles très fertiles. Le Vietnam a également reconnu la souveraineté chinoise sur 47% du golfe du Tonkin, alors que Pékin n'en contrôlait auparavant que 38% aux termes d'un accord signé en 1885 entre la Chine et la France, dont le Vietnam était une colonie, a-t-il ajouté.

La grogne contre ces "traités inégaux", dont les détails n'ont été rendus publics ni par Hanoï ni par Pékin, a également été l'un des facteurs de la mise à l'écart l'année dernière du secrétaire général du parti communiste vietnamien, le général Le Kha Phieu, qui avait supervisé les négociations avec Pékin, a encore affirmé ce diplomate. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères a affirmé de son côté que les accords frontaliers "ont marqué une étape importante dans la construction d'un environnement régional stable permettant aux deux pays de se consacrer à leur développement économique et social".

Après son interpellation, le dissident Bui Minh Quoc avait été interrogé pendant trois jours par des policiers qui lui avaient confisqué plus de trois cents documents, dont des textes et des photos, qualifiés de "réactionnaires" par les autorités, selon RSF.

Agence France Presse, le 24 Janvier 2002.