Le Vietnam s'intéresse à l'arabica
Accusé d'inonder le marché avec du café robusta
et d'avoir fait chuter les cours mondiaux, le
Vietnam se tourne vers la production d'arabica,
de meilleure qualité.
Le Vietnam ne représentait voilà dix ans qu'une
goutte dans la production mondiale de café.
Aujourd'hui, c'est le principal producteur de
robusta dans le monde et le deuxième
exportateur de café après le Brésil, pays qui
produit principalement de l'arabica.
Mais avec des cours pour le robusta au plus bas
depuis trente ans, les producteurs vietnamiens
sont en difficulté et Hanoï entame une révision
de sa stratégie.
L'Association du café et cacao du Vietnam
(VICOFA) entend remplacer les plantations de
robusta dans les régions non propices par
d'autres cultures et augmenter parallèlement la
production d'arabica, notamment dans le Nord
montagneux.
"Nous voulons accroître la zone de culture de
l'arabica pour diversifier notre production de café
parce que l'arabica est plus rentable et que ses
prix sur le marché sont régulièrement plus
élevés", explique Doan Trieu Nhan, président de
la VICOFA.
"Mais en même temps, nous souhaitons toujours
rester un important producteur de robusta sans
affecter la situation mondiale de l'offre et de la
demande", ajoute-t-il.
L'arabica représente actuellement 20.000
hectares des 500.000 hectares estimés cultivés
en café au Vietnam et 2% de la production. Le
gouvernement vise pour 2010 une production de
600.000-700.000 tonnes, dont 20 à 30%
d'arabica, chiffres jugés très ambitieux par des
experts.
Des négociants internationaux de café pensent
que le Vietnam devrait plutôt améliorer la qualité
de son robusta car l'arabica est plus difficile et
plus cher à produire. "Il existe un bon potentiel
pour l'arabica mais il est bien plus difficile à
traiter que le robusta", note l'un d'eux qui
souhaite conserver l'anonymat.
"Le Vietnam ne sera jamais concurrentiel en
termes de qualité par rapport à des pays comme
la Colombie car il est dépourvu des conditions
d'altitude adéquates", observe-t-il.
Mais Olivier Gilard, responsable du programme
rural de l'Agence française de développement
(AFD), pense que "c'est une bonne idée pour la
VICOFA de mélanger la production d'arabica et
robusta car les prix sur le marché mondial sont
meilleurs pour l'arabica, donc les agriculteurs qui
en produisent pourront en bénéficier en termes
de revenus".
Les cultivateurs subissent depuis trois ans des
difficultés. Certains ont déjà abandonné le café
pour la noix de cajou, le piment ou le maïs.
"J'ai commencé à produire du robusta en 1999
en voyant d'autres agriculteurs s'enrichir grâce
au café", explique Nguyen Van Be, du district de
Long Khanh dans la province de Dong Nai
(Nord-Est d'Ho Chi Minh Ville).
"Mais depuis, j'ai perdu de l'argent chaque
année. Mes recettes n'ont pas couvert les coûts
et j'ai des problèmes pour entretenir ma famille",
se plaint-il.
La VICOFA, qui tient compte de la sécheresse
l'an dernier dans les régions centrales
principales productrices, a réduit ses prévisions
d'exportation pour 2002-2003 à
520.000/600.000 tonnes contre 700.000 tonnes
durant la précédente campagne.
Cette baisse était prévisible, estiment des
critiques en pointant l'augmentation en flèche de
la production (413.580 tonnes en 1997-98,
900.000 tonnes en 2000-01) qui a conduit
d'autres pays producteurs à accuser le Vietnam
d'être responsable de la chute des cours.
Selon un autre expert occidental, "le Vietnam
n'est pas complètement à blâmer. C'est aussi de
la faute des acheteurs. Tant qu'ils achètent du
mauvais café, les cultivateurs en produiront".
Le gouvernement a édicté de nouveaux critères
de qualité pour le robusta, mais "il faudra
beaucoup de travail avant d'y satisfaire", estime
M. von Enden tout en pensant que "c'est un
grand progrès pour respecter les critères
internationaux et maintenir la compétitivité du
Vietnam".
Par Ben Rowse - Agence France Presse - 10 Février 2003.
|